Mystère autour de la suspension de procureurs

Une suspension a été imposée à des procureurs du DPCP. Qui? Pourquoi? Mystère…
La Commission de la fonction publique a émis le 11 août une ordonnance de confidentialité provisoire visant à protéger l'identité de procureurs dans un différend les opposant au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).

Cette décision rendue par Me Mathieu Breton, juge administratif à la Commission de la fonction publique, fait suite à une demande de l'Association des procureurs aux poursuites criminelles et pénales, qui a déposé le 7 août un avis de mésentente contestant la suspension de trois jours imposée aux personnes concernées par ledit avis.
L’Association était représentée par Me Marie-Jo Bouchard, du cabinet Melançon Marceau Grenier Cohen.
L’Association a demandé le même jour à la Commission d’ordonner provisoirement « la mise sous scellé, la confidentialité, la non-publication, la non‑divulgation et la non-diffusion de l’avis de mésentente […] ainsi que de tous les documents s’y rapportant et susceptibles d’identifier » les personnes concernées.
Des précédents…
Elle a plaidé au soutien de sa demande que cette affaire était directement liée à deux autres recours déjà en cours devant la Commission. Ces deux recours contestent des relevés provisoires imposés aux personnes concernées, peut-on lire dans la plus récente décision de la Commission.
Dans ces dossiers, la Commission avait déjà accordé des ordonnances de confidentialité provisoires pour les mêmes personnes et les mêmes faits. Ces ordonnances avaient été émises les 13 et 23 mai, et réitérées le 20 juin. Elles faisaient suite à des recours déposés par l’Association les 9 et 21 mai.
Dans sa décision du 13 mai, la Commission avait souligné que les motifs invoqués par l’Association au soutien de la demande d’ordonnance provisoire semblaient à première vue « susceptibles de causer des préjudices sérieux et irréparables ».
« En effet, l’Association invoque que la sécurité des personnes concernées et de leurs proches pourrait être compromise », écrivait-elle.
Le 20 juin, la Commission s’est prononcée sur une demande d’ordonnance de sauvegarde visant la réintégration des personnes concernées dans leurs fonctions au DPCP pendant la tenue de l’enquête à leur égard. Cette demande était accompagnée d’une demande d’ordonnance provisoire de confidentialité.
Dans cette décision, la Commission a conclu que l’Association n’avait pas réussi à s’acquitter de son fardeau de la preuve.
« Elle ne démontre pas la présence de tous les critères nécessaires afin qu’une ordonnance de sauvegarde soit émise pour réintégrer les personnes concernées dans leur emploi au DPCP », a jugé la Commission, mentionnant du reste que la procédure et la preuve étaient déjà couvertes par les ordonnances de confidentialité émises en mai.
La décision du 11 août
Bien que la position du DPCP (non représenté devant la Commission) ne soit pas explicitement détaillée dans le jugement, la Commission a agi sur la base de la demande de l'Association et des précédents établis.
La Commission a fondé sa décision sur la cohérence avec les décisions précédentes et sur le risque de préjudices sérieux et irréparables pour les procureurs concernés et leurs proches, notamment en matière de sécurité.
En se basant sur la jurisprudence établie, la Commission a également jugé que la prudence était de mise et que la balance des inconvénients penchait en faveur de l'octroi d'une ordonnance de confidentialité provisoire.
La Commission a donc ordonné la mise sous scellés de l'avis de mésentente et des documents s'y rapportant, interdisant leur divulgation, publication, diffusion et accès aux tiers. Ces mesures sont provisoires et resteront en vigueur jusqu'à ce que la Commission se prononce sur le bien-fondé d'émettre des ordonnances permanentes, après avoir entendu les arguments des deux parties.
Silence au DPCP…

Le service des relations avec les médias du DPCP s’est gardé de répondre à nos questions, confirmant seulement que les « personnes concernées sont présentement en poste ».
« En raison des obligations de confidentialité auxquelles nous sommes assujettis comme employeur à l’égard de nos employés, nous ne pouvons fournir plus de précisions », a justifié par courriel la porte-parole adjointe du DPCP, Me Patricia Johnson.
Le 9 mai, des médias, dont Radio-Canada, avait rapporté que trois procureures du DPCP au Saguenay-Lac-Saint-Jean avaient été relevées de leurs fonctions et qu’elles seraient absentes pour une durée indéterminée.
Une porte-parole du DPCP avait alors invoqué des raisons de relations de travail et des règles de confidentialité pour justifier son refus de donner davantage d'informations. Elle avait ajouté que ces procureures n'agissaient pas pour le DPCP à ce moment.