Une première pour une Trans!
Marie-Ève Buisson
2024-07-04 15:00:58
La Commission des droits célèbre sa première victoire dans un dossier de discrimination en emploi basé sur l’identité de genre…
Une femme trans, discriminée par un employeur en raison de son identité de genre, a remporté une victoire devant le Tribunal des droits de la personne dans une affaire soutenue par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPD).
Le tribunal a accordé un montant de 10 000$ à la femme comme dommages moraux, 118,40$ à titre de perte salariale et 4000$ en guise de dommages punitifs.
C’est l’avocate Justine St-Jacques qui a représenté la demanderesse E.B. dans ce jugement.
Les parties défenderesses n’ont jamais répondu à la demande ni n’étaient présentes lors de l’audience, de sorte que le Tribunal a procédé par défaut sur la base de la preuve offerte par la CDPD.
Mise en contexte
E.B. s’identifie comme femme trans. Elle a postulé pour un emploi au sein du Bar Lucky 7 comme serveuse. Après quelques heures de formation, le gérant du bar Sayeed Ahmed Sikder a demandé à la femme si elle était trans à cause de sa voix.
« Ça paraît un peu dans ta voix (que tu es trans). Moi, ça me dérange pas, mais c’est mon père qui veut pas… Juste la semaine passée, il a fallu que je sorte quelqu’un avec un bat de baseball. La clientèle est vieux-jeu, je ne veux pas avoir à prendre ta défense tous les jours », lui a-t-il dit.
M. Sikder lui a signifié par la suite qu’il ne pouvait pas l’engager.
E.B. lui a fait valoir que c’était de la discrimination, que selon la Charte il ne peut pas refuser de l’embaucher pour cette raison, que ce serait comme de refuser d’embaucher une femme parce qu’elle est enceinte.
Deux semaines plus tard, elle a déposé une plainte auprès de la CDPDJ.
Dans les jours et les semaines qui ont suivi l’événement du 31 mars 2017, E.B. est « dépressive » et « développe une obsession » quant au timbre de sa voix. Elle a d’ailleurs fait deux séjours aux États-Unis pour être opérée aux cordes vocales.
Un jugement historique
« Il s'agit d'un jugement important, puisque c'est l'une des premières causes remportées par la Commission des droits pour un dossier de discrimination en emploi basée sur l'identité de genre », déclare le président de la Commission des droits, Philippe-André Tessier.
Il ajoute: « Nous espérons que cette décision permettra de sensibiliser les employeurs et la population au respect du droit à l'égalité des personnes trans, qui est protégé par la Charte des droits et libertés de la personne ».
Pour Me Stéphanie Fournier, avocate à la direction des affaires juridique de la CDPD, ce jugement a une portée sociale très importante.
« On se rend compte qu’il n’y a pas beaucoup de dossiers sur le même sujet. Pourtant, on le voit, la discrimination, les préjugés et les stéréotypes sont beaucoup présent dans notre société. C’est important que les gens connaissent leurs droits », dit-elle.
Pour l’avocate, les paragraphes 93 à 96 du jugement sont très intéressants.
« L’employeur doit prendre toutes les mesures humainement logiques et raisonnables afin d’assurer la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs », peut-on lire.
La responsabilité de l’employeur de voir à la santé et à la sécurité exige donc de prendre toutes les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif.
Selon l’avocate, on ne peut plus dire que la clientèle est vieux-jeu pour expliquer une discrimination. De nombreux jugements le démontrent, ajoute-t-elle.
« On ne peut plus se réfugier derrière les préférences de la société pour justifier la discrimination », conclut-elle.
Mathieu
il y a 3 moisVous devriez parler d'une "femme trans" ou d'une "personne trans" dans vore titre, ce serait plus poli.
On parle ici d’un jugement par défaut… pas un grand précédent!