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Si c’est exclu, on ne défend pas dit la Cour d’appel

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Béatrice D’anjou

2025-07-28 11:15:53

Focus sur une récente décision de la Cour d’appel du Québec en matière de droit des assurances.

Béatrice D’Anjou - Source : RSS Avocats

La Cour d’appel du Québec vient de rendre une décision importante pour le milieu de l’assurance : Intact Insurance Company c. Hydromec inc., 2025 QCCA 803, où, exceptionnellement elle infirme une ordonnance Wellington pourtant accordée en première instance. Petit rappel : une demande Wellington permet à un assuré d’exiger que son assureur prenne en charge sa défense dès qu’il existe une simple possibilité de couverture par la police d’assurance.

Dans la pratique, il est rare qu’une telle demande soit refusée, puisque le seuil à atteindre est minimal c’est-à-dire une preuve prima facie que la police d’assurance pourrait trouver application. Dans cette affaire, Hydromec vend un transporteur forestier à 9351-9817 Québec inc. Celui-ci prend feu en opération. AIG indemnise son assurée (9351-9817 Québec inc.) et poursuit Hydromec en subrogation, alléguant la garantie légale de qualité (art. 1726 C.c.Q.). Hydromec réclame qu’Intact prenne sa défense, mais Intact s’y oppose, invoquant une exclusion claire dans la police pour les dommages au produit de l’assuré découlant d’une défectuosité existante au moment d’une vente de produits.

En décembre 2024, la Cour supérieure donne raison à Hydromec, retenant qu’à ce stade préliminaire, il suffit d’une possibilité de couverture (et non d’une certitude). La cause précise du sinistre étant encore inconnue, la cour a jugé qu’elle ne pouvait donc pas conclure avec certitude que le dommage subi en l’espèce a été occasionné par une défectuosité existant au moment de sa vente et donc que l’exclusion en litige s’applique.

La cour conclut donc à l’obligation de défendre. Toutefois, elle refuse à Hydromec le droit de choisir ses avocats, rappelant que ce choix revient à l’assureur. Au terme d’une audience tenue le 20 juin 2025, la Cour d’appel donne finalement raison à Intact et confirme que le fait que la juge de première instance ne pouvait se prononcer sur la cause du sinistre n’aurait pas dû l’empêcher de se prononcer sur la question déterminante de savoir si une indemnité pouvait être payable en vertu de la police, considérant la nature de la demande.

Ici, le recours repose uniquement sur la garantie légale de qualité et sur une défectuosité au moment de la vente, ce qui est expressément exclue par la clause 2.9 de la police. Même si la cause précise de l’incendie reste inconnue, l’analyse des allégations de la poursuite ne révèle aucune autre base de responsabilité couverte. Résultat : pas d’obligation de défendre pour Intact. Cette décision est importante à retenir car la Cour d’appel y rappelle que l’obligation de défendre n’est pas absolue. Oui, les allégations doivent être lues largement, mais pas de manière fantaisiste pour forcer la couverture. Ce n’est que lorsqu’il existe réellement une ambiguïté ou un doute que l’obligation de défendre doit être interprétée en faveur de l’assuré. Si la réclamation tombe clairement dans une exclusion, il n’y a tout simplement pas de possibilité de couverture et aucune obligation de défendre l’assuré.

À propos des auteurs

Béatrice D’Anjou est avocate au sein du groupe de droit des assurances chez RSS. Elle plaide couramment des requêtes contestées en plus de procéder à la rédaction de procédures, d’argumentations écrites et d’opinions juridiques dans les domaines du droit civil, de la responsabilité professionnelle et du droit des assurances.

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