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La Cour supérieure autorise une poursuite contre un avocat

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Gabriel Poirier

2022-03-16 13:15:00

L’avocat demandait au tribunal de rejeter la poursuite sous prétexte que les faits seraient prescrits…

L'avocat poursuivi est Me Yves Vaillancourt.
L'avocat poursuivi est Me Yves Vaillancourt.
La Cour supérieure accepte d’entendre le recours de Borhis Vivian Djidjoho Takpa ; l’homme originaire du Bénin, qui détient le statut de résident permanent, a déposé une poursuite en responsabilité professionnelle contre l’avocat Yves Vaillancourt, le 16 août dernier.

Il lui reproche d’avoir commis des fautes professionnelles alors qu’il le représentait dans un dossier de leurre et de pornographie juvénile. M. Takpa a retenu les services de l’avocat en 2017, alors qu’il était âgé de dix-neuf ans.

Me Vaillancourt et le Fonds d’assurance en responsabilité professionnelle du Barreau, qui est aussi visé par le recours, prétextaient que les faits allégués étaient prescrits.

Le juge Pierre Nolet, de la Cour supérieure, n’est pas de cet avis.

« Le Tribunal conclut que c’est la connaissance des faits menant au recours et non le droit au recours qui est déterminant », oppose-t-il.

Borhis Takpa était représenté par Camille Tremblay-Dumais, de Savard avocats, tandis que Me Vaillancourt et le Barreau étaient représentés par Bernard Amyot et Réginald Labonté, de LCM Avocats.

Vous pouvez lire le jugement ici.

À un poil de l’expulsion

Borthis Takpa a plaidé coupable en 2017 à une infraction de leurre par procédure sommaire plutôt que par acte d’accusation.

Le hic ? Me Vaillancourt n’a pas informé le juge Christian Boulet quant à son statut de résident permanent. M. Takpa ignorait qu’une telle condamnation lui vaudrait une interdiction de territoire d’office, sans possibilité d’appel.

Mes Bernard Amyot et Réginald Labonté. Source: Site web de LCM Avocats
Mes Bernard Amyot et Réginald Labonté. Source: Site web de LCM Avocats
Il l’aurait appris en décembre de la même année alors qu’il purgeait sa peine de six mois. C’est à ce moment que la Commission de l’Immigration et du statut de réfugié (CSIR) a émis un mandat d’arrestation contre lui.

« (Borthis Takpa) reproche à Me Vaillancourt de ne pas avoir agi de façon raisonnable sachant qu’il représentait un accusé immigrant qui avait le statut de résident permanent, en négligeant d’en informer le juge contrairement à son obligation, en négligeant de négocier une peine inférieure à 6 mois ou de plaider l’inconstitutionnalité de la peine minimale », explique le juge Nolet.

Une rencontre avec l’avocat Hugues Langlais, datée de mars 2018, semble avoir été décisive, puisqu’elle aurait permis à Borthis Takpa de constater la faute alléguée d’Yves Vaillancourt.

À noter que le CSIR a choisi en avril 2018 d’expulser M. Takpa du pays avant que cette décision ne soit cassée par la Cour fédérale en mai 2019.

Quelle limite aux délais de prescription ?

Deux visions s’affrontaient, mais le juge Pierre Nolet a finalement donné raison à Borthis Takpa. Ce dernier alléguait que la date de départ de la prescription remontait au moment où il a pris connaissance de la faute de son ancien avocat, une interprétation retenue par le juge.

« Selon M. Takpa, ce n’est qu’à compter du 8 mars 2018 qu’il apprend la faute professionnelle de Me Vaillancourt. En effet, c’est à cette date que ses avocats l’informent de l’existence d’une faute de son ancien avocat. Pour cette raison, le délai de prescription devrait se calculer à compter de ce moment. La prescription ne serait donc acquise que le 4 septembre 2021 en tenant compte des 170 jours de suspension des délais pendant la pandémie Covid-19. »

Me Vaillancourt soutenait plutôt que la prescription arrivait à échéance le 3 août 2021, trois ans après que l’Agence des Services Frontaliers du Canada a émis un mandat d’arrestation contre M. Takpa.

Boris Takpa a introduit son action en dommages contre Me Vaillancourt et le Fonds d’assurance du Barreau le 16 août 2021.

« Toutefois, jusqu’au 8 mars, Takpa ignore l’existence d’une faute de la part de son ancien avocat. Le délai de trois semaines entre la sortie de prison et la découverte de la faute ne peut être qualifié d’exagéré, du moins pas à première vue », complète le magistrat.

« Ignorant cette faute (d’Yves Vaillancourt, NDLR), il ne peut établir de lien de causalité entre les actes de son avocat et les dommages qu’il commence à subir et qui lui apparaissent alors comme étant reliés à la condamnation plutôt qu’à une négligence de son avocat. »

Me Tremblay-Dumais et le Barreau du Québec ont décliné notre demande d’entretien. Contacté par Droit-inc, Me Vaillancourt n’avait pas donné suite à notre demande d’entretien au moment d’écrire ces lignes.
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