La Presse

Rio Tinto au pays des avocats indiens

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Rene Lewandowski

2010-03-16 08:30:00

C'est vraiment un pur hasard si l'on retrouve dans ce numéro un reportage consacré à Jacynthe Côté, la nouvelle chef de la direction de Rio Tinto Alcan et un autre sur Mme Kiran Mazumdar-Shaw, la reine des biotechs, en Inde.

Mais c'est un hasard qui tombe bien! Car c'est justement de cela dont je voulais vous parler pour cette première chronique juridique de La Presse Affaires Magazine. Pas de ces deux femmes de tête, dont les exploits sont bien racontés dans nos pages, mais plutôt de Rio Tinto. Et de l'Inde.

Il y a moins d'un an, rappelons-le, Rio Tinto annonçait une entente bien particulière avec CPA Global. Cette société de Jersey, dans les îles Anglo-Normandes, fournit des services juridiques en sous-traitance aux cabinets d'avocats internationaux et grandes entreprises étrangères. Avec un certain succès, semble-t-il, puisque l'entreprise compte plus de 1400 employés dans une dizaine de pays, dont l'Inde. À Delhi, elle exploite deux véritables «usines» de services juridiques où quelque 600 avocats, techniciens juridiques et employés de soutien indiens répondent présents matin et soir.

Chez nous, la nouvelle n'a pas fait grand bruit et nos amis du reste du Canada en ont brièvement fait mention. Mais elle a retenu l'attention de bien des avocats d'entreprises et d'à peu tous les chefs de départements juridiques de la planète. Il faut dire que ce partenariat avait de quoi surprendre. Car une équipe d'avocats indiens de CPA Global allaient dorénavant fournir du soutien juridique aux avocats internes de Rio Tinto - ils sont 80 environ basés un peu partout dans le monde. Le deal devait permettre au géant minier d'économiser beaucoup d'argent sur ses frais juridiques.

Où en est-on neuf mois plus tard? Pas mal mieux que ce que les dirigeants avaient prévu. Le mois dernier, Leah Cooper, une des avocates de Rio Tinto qui avait scellé l'entente, s'est dite ravie des résultats. Me Cooper, en fait, a tellement aimé l'expérience qu'elle s'est jointe le mois dernier à CPA! On le serait à moins: les avocats de CPA ont travaillé sur près de 250 mandats pour Rio Tinto, qui estime avoir épargné 13,9 millions de dollars US en frais juridiques!

«C'est un bon système, il permet à nos avocats internes de déléguer des tâches en Inde pour se concentrer ici sur du travail juridique à haute valeur ajoutée», dit le vice-président, Affaires juridiques, de Rio Tinto Alcan, Pierre Chenard (photo). Il explique avoir transféré plusieurs fois de Montréal du travail juridique en Inde et estime que le boulot effectué par les avocats indiens est de très bonne qualité. Il a donc l'intention de récidiver au cours des prochains mois.

De quoi inquiéter les grands cabinets d'avocats? Pas vraiment. En tout cas, pas pour le moment. Car essentiellement, la dizaine d'avocats de CPA assignés exclusivement à Rio Tinto exécutent des tâches que les grandes firmes n'offrent plus depuis longtemps ou qu'elles délèguent elles-mêmes à d'autres sous-traitants. Ils font de la révision préliminaire de contrats, élaborent des ébauches de nouveaux contrats, font de la recherche sur l'internet pour vérifier des textes de lois dans diverses juridictions, révisent des documents dans le cadre de litiges...

Il n'empêche que lentement mais sûrement le phénomène prend de l'ampleur. Et que les entreprises, grandes surtout pour le moment, prennent conscience qu'elles peuvent épargner gros en frais juridiques. Le mois dernier, c'était au tour de Microsoft d'annoncer un partenariat avec CPA pour lui confier des mandats juridiques.

Déjà, on estime que les revenus générés dans le monde par la sous-traitance juridique atteindront deux milliards de dollars US d'ici 2013. Mais cette évaluation pourrait bien être revue à la hausse si les mandats sous-traités en Inde ou ailleurs se complexifient. À Delhi, par exemple, ces derniers mois, l'équipe d'avocats dédiée à Rio Tinto s'est agrandie à quelques reprises, le temps de permettre aux juristes indiens de travailler sur des mandats bien précis de fusions et d'acquisitions, notamment en vérification diligente. Des tâches habituellement confiées aux grands cabinets...
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5 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Québec
    je me demande si on est protégé au Québec contre ce genre de menace en raison de la barrière de la langue. Les avocats indiens parlent-ils français?

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Viva Brasil
    Ouh ouh cela me donne envie d'aller à Rio.
    Roger C.

    • Me
      Re : Viva Brasil
      Les gens qui emploient des termes comme ouh ouh démontrent qu'ils font partie d'une basse classe sociale comme la plupart des jeunes avocats qui emploient des métaphores sportives et qui portent le complet Tristan

      > Ouh ouh cela me donne envie d'aller à Rio.
      > Roger C.

  3. Me
    Me
    Les honoraires d'avocats étant déductibles, le gouvernement n'a qu'à s'assurer qu'ils sont déductibles seulement lorsque payés à des avocats au pays.

  4. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Re: Me
    "le gouvernement n'a qu'à s'assurer qu'ils sont déductibles seulement lorsque payés à des avocats au pays."


    Plus simple: le gouvernement n'a qu'a laisser les laisser se planter.

    Avec leur éducation 100% common-law, ils feront encore plus de dégats que les diplômé de McGill.

    Si on est chanceux, ils seront tenus de s'assurer auprès du Barreau: ça fera exploser les primes, et lorsque moins de gens auront les moyens de se la payer, on désengorgera le système de la majorité des avocats incompétents (il ne restera que les incompétent riches, qui sont plutôt rares).

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