Jurisprudence

Quelle sentence pour l’ex-prof coupable d’agression sexuelle?

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Agence Qmi

2014-01-27 13:15:00

L'ex-enseignante pourrait écoper d'une peine d'emprisonnement, d’après plusieurs criminalistes. Le juge devrait alors déterminer si elle purgera sa peine dans la collectivité ou en prison...

Tania Pontbriand a été reconnue coupable jeudi d'agressin sexuelle et d'attouchements sexuels sur un élève de 15 ans.
Tania Pontbriand a été reconnue coupable jeudi d'agressin sexuelle et d'attouchements sexuels sur un élève de 15 ans.
La femme de 44 ans a été reconnue coupable jeudi d’agression sexuelle et d’attouchements sexuels sur un élève de 15 ans.

Maintenant qu’il a rendu son verdict, le juge Valmont Beaulieu devra déterminer la sentence de l’ex-enseignante. Peine à purger dans la collectivité, probation imposée, prison, travaux communautaires. Les possibilités de sentence sont vastes. Et pour déterminer la peine, de nombreux éléments doivent être pris en considération.

«Pauvre juge Beaulieu. Ce n’est pas une facile qu’il a là», lance l’avocat Gilles Hébert, ancien juge à la Cour supérieure, précisant que la détermination de la sentence est un exercice difficile.

La professeure d’éducation physique a entretenu une relation amoureuse interdite avec un de ses élèves pendant près de deux ans entre 2002 et 2004. À l’époque, elle avait 30 ans, soit le double de son âge.

Le jeune homme a porté plainte en 2007 et la femme a été arrêtée un an plus tard. Son procès s’est ouvert en 2011.

Perception négative

Robert La Haye, criminaliste
Robert La Haye, criminaliste
Dans son jugement de 155 pages rendu public jeudi, le juge Beaulieu a été dur à l’endroit de Tania Pontbriand, indiquant qu’elle avait «utilisé» la victime pour «satisfaire égoïstement son appétit sexuel».

Selon lui, l’accusée a exploité la naïveté, le manque de maturité, la dépendance et la confiance de l’adolescent.

«L’évolution de la relation et l’emprise de la victime: ce sont des facteurs que le juge va considérer s’il le dit comme ça dans son jugement», croit le criminaliste Me Robert La Haye.

Selon Gilles Hébert, ces termes utilisés par le juge Beaulieu peuvent être «dangereux» pour Pontbriand.

«Le juge a une perception très négative de la conduite de l’accusée», souligne-t-il.

Pour Mes Hébert et La Haye, la multiplicité des actes sexuels aggrave son cas. La victime a en effet déclaré au procès avoir eu plus de 300 relations sexuelles avec son amante.

«Ce n’est pas une fois sur un coup de tête. Ça s’échelonne sur deux ans. Il y a le volet répétitif de l’infraction criminelle qui peut être interprété négativement», dit Me Hébert.

Selon lui, le juge va aussi certainement tenir compte de l’intérêt public et de l’effet dissuasif. «Il va rendre une sentence pour que ça décourage d’autres professeurs de poser des gestes comme ça», croit-il.

En faveur

Me Gilles Hébert, ancien juge à la Cour supérieure
Me Gilles Hébert, ancien juge à la Cour supérieure
Mais d’autres éléments jouent en faveur de Tania Pontbriand. Absence d’antécédent judiciaire, perte d’emploi à la suite des accusations, grande médiatisation de sa cause et nombreux délais.

«Elle a quand même eu sa punition... Dans sa vie personnelle, cela a dû avoir un impact très négatif», souligne Gilles Hébert, qui ne croit pas que le juge va imposer une peine de plus de deux ans. «Qu’est-ce qu’elle fait depuis ce temps-là? Est-ce qu’elle démontre une certaine empathie? Le juge doit écouter les représentations des avocats et décider ensuite», ajoute Me La Haye.

Les représentations sur la peine doivent se tenir le 8 mai au palais de justice de Saint-Jérôme.

Dans ce cas-ci, le juge n’a pas de peine minimale à respecter puisque les faits se sont déroulés entre 2002 et 2004. Une peine minimale d’un an est imposée pour une agression sexuelle sur un jeune de moins de 16 ans depuis août 2013.

Lien d’autorité, par Julie Couture, avocate criminaliste

Me Julie Couture, avocate criminaliste
Me Julie Couture, avocate criminaliste
Vivait-il un fantasme ou un cauchemar? Cette question que plusieurs se posent, à propos de l’adolescent avec qui l’enseignante Tania Pontbriand a entretenu une liaison interdite, n’aura pas d’incidence sur sa sentence. L’enjeu n’est pas là. C’est strictement le lien d’autorité de l’accusée sur la victime qui rend le tout criminel. Un enseignant a, dans la grande majorité des cas, un lien d’autorité sur ses élèves. Tania Pontbriand n’aura pas été une exception à la règle.

Séquelles

D’ailleurs, il appert du témoignage de l’adolescent que sa relation avec l’accusée lui a laissé de graves séquelles au point qu’il a même songé s’enlever la vie. C’est exactement ce genre de situation que la loi veut éviter.

Les relations sexuelles se sont déroulées entre 2002 et 2004, donc avant un changement majeur au Code criminel qui ne permet maintenant plus aux délinquants sexuels de purger leur emprisonnement dans la collectivité. Si le crime avait été commis aujourd’hui, l’enseignante ferait face à une peine minimale d’une année de prison. L’ex-enseignante bénéficie de la loi telle qu’elle était à l’époque, donc moins sévère. Elle pourra demander au juge Valmont Beaulieu d’éviter la prison.

Sentence

Son avocate plaidera probablement qu’elle n’a pas une personnalité délinquante et qu’un séjour en cellule ne sera bénéfique ni pour elle, ni pour la société. Alors qu’elle avait décidé de se prévaloir de son droit au silence et de ne pas témoigner pour sa défense lors de son procès, elle pourrait maintenant décider de s’exprimer pour aider le juge à choisir une sentence.

Rappel des faits:

Tania Pontbriand et la victime ont discuté toute la nuit dans un camion lors d’une excursion organisée par l’école.

Quelques semaines plus tard, les deux sont retournés en camping seuls. Ils ont eu leur première relation sexuelle.

L’accusée lui remet un collier sur lequel elle a fait graver leurs initiales et la date de leur première relation sexuelle.

Ils se sont rendus seuls à Toronto, en camping et en expéditions plusieurs fois.

Pour les 16 ans de la victime, l’accusée lui a remis 16 cadeaux.

Le jeune homme dit qu’ils ont eu plus de 300 relations sexuelles.

L’accusée lui a acheté un cellulaire qu’il utilisait seulement pour la contacter.

La relation s’est terminée lorsque le jeune homme était au cégep.

Pour lire le jugement complet, cliquez ici
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