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Campagne électorale: le meilleur et le pire!

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Ryan Hillier

2018-09-06 13:15:00

Quel parti connaît le meilleur début de campagne? Et le pire? Une analyse du chef de la direction et fondateur de NOVAlex...

Me Ryan Hillier est chef de la direction de NOVAlex
Me Ryan Hillier est chef de la direction de NOVAlex
Tout au long des élections provinciales 2018, une fois par semaine, Me Ryan Hillier partagera un résumé des faits saillants de la campagne, et fournira une analyse objective et non-partisane des bons (et moins bons) coups des divers partis et candidats en lice. Au menu : dossiers piquants, chaudes luttes et déclarations croustillantes !

Un départ inégal

Cela fait maintenant une douzaine de jours que s'est entamée, officiellement, la campagne électorale qui mènera au premier scrutin à date fixe de l'histoire des élections québécoises, le 1er octobre prochain.

Bien que les partis, leurs chefs et leurs candidats vedettes soient déjà en campagne depuis maintenant plusieurs mois, ces premiers jours depuis l’émission des brefs d’élections auront notamment permis aux différentes formations politiques de commencer à se distinguer, auprès d'une population qui semble, pour la première fois depuis des années, un peu plus interpellée par la chose politique.

Par contre, derrière les promesses et les belles paroles des partis, que nous offrent-ils vraiment ? Sur quelles idées misent-ils ? On en discute sommairement dans le cadre de cette première chronique, en passant par les principaux thèmes qui ont défini les quatre partis politiques principaux depuis le début de la campagne, mais aussi, dans certains cas, par les scandales qui les ont secoués.

''Meilleur début de campagne (ex æquo) : le Parti libéral du Québec (PLQ) et Québec solidaire (QS) / Note de 7,5 sur 10''

''PLQ''

En tant que gouvernement sortant, le PLQ a, d’une part, le « beau » rôle de pouvoir vanter son bilan depuis qu’il est en poste, et d’autre part, le défi d’avoir à le défendre. Les élections passées nous apprennent qu’il s’agit là d’un exercice fort délicat, que seuls les grands stratèges politiques des dernières décennies ont réussi à bien exécuter.

Cette année, le plan de match du PLQ semble bien équilibré à cet égard : on met en lumière les bons coups du « règne » libéral des dernières années, tout en offrant un renouveau à travers des candidatures plus jeunes et un programme électoral actualisé. À ce titre, la formule paraît jusqu’à présent avoir un effet favorable. Le PLQ n’a commis que très peu de bourdes (profitant, au passage, de celles des autres – ne pensons qu’à la saga Ginette Bourdon à Québec) et d’articuler des promesses s’enlignant dans une vision de continuité. Le slogan de campagne « Faciliter la vie des Québécois », malgré qu’il ne soit pas très marketing, dit ce qu’il a à dire, et peut plaire à une majorité de Québécois à une époque où l’instabilité d’autres régimes et leaders politiques à travers le monde dérange.

En proposant des engagements précis et mesurables, tels la gratuité des soins dentaires pour les adolescents et les aînés démunis, la modernisation des écoles, ainsi qu’un meilleur soutien au personnel soignant et aux enseignants, mais également aux personnes handicapées et leur famille, le PLQ rappelle à l’électorat que sa priorité est l’amélioration de la qualité de vie de la population et qu’il ne faut pas changer une formule « gagnante ».

''QS''

Québec solidaire connaît un début de campagne que je qualifierais de « très bien ». Ayant le bénéfice d’un bassin de candidats « vedettes » plus important qu’aux derniers scrutins, la formation de gauche peut aujourd’hui compter sur un nombre plus important de têtes d’affiche capables de communiquer efficacement les messages et promesses de la formation à la population toute entière. Bien que ses candidats plus connus se trouvent surtout à Montréal, ses propositions audacieuses distinguent clairement QS des autres formations politiques et lui permettent de se faire davantage connaître à travers la province.La fusion récente avec Option nationale a également permis à QS de rassembler les forces souverainistes de gauche.

Manon Massé, qui vit sa première campagne à titre de cheffe, réussit à « compter des points » au sein de son électorat potentiel, principalement les Québécois de gauche, les jeunes et les péquistes déçus. Les quelques promesses de QS mises de l’avant jusqu’à présent ont également su capter l’attention des médias et l’imaginaire de la population. Celles visant le système éducatif, notamment la fin des subventions aux écoles privées et la gratuité scolaire du CPE au doctorat, ont été assez percutantes. Gageons que si QS continue dans cette même voie, son score électoral montera de façon significative, comparativement à celui de 2014.

Cela dit, si QS espère connaître un meilleur sort que celui de 2014, il devra nettement mieux séduire l’un de ses bassins naturels d’électeurs : les jeunes. En effet, un sondage mené au courant des derniers jours à ce sujet démontre, surprenamment, que ce sont surtout le PLQ et la CAQ qui ont la cote chez les 18 à 34 ans jusqu’à présent, ce qui inquiète nécessairement le war room de QS.

''Pire début de campagne : la Coalition Avenir Québec (CAQ) / 5 sur 10''

Il faut dire qu’il n’est jamais facile de débuter une campagne électorale en tant que meneur, surtout lorsque la vaste majorité des sondages nous prédisent vainqueurs majoritaires du scrutin à venir. Le Parti québécois de Pauline Marois en est un très récent exemple, lui qui, à l’aube du scrutin de 2014, voguait, entre autres, sur l'enjeu de la Charte des valeurs, seulement pour se faire arracher la victoire par les Libéraux de Philippe Couillard au fil d’arrivée.

Mais en 2012, la CAQ était elle aussi passée près du pouvoir, se faisant coiffée de justesse en bout de piste, et aboutissant, du coup, dans la deuxième opposition. Or, cette année, en pré-campagne, on sentait que la formation caquiste était déterminée à ne pas répéter les erreurs du passé, elle qui avait réussi un pire score au scrutin de 2014 qu’à celui de 2012. En misant sur un nombre impressionnant de candidats « vedettes », la parité hommes-femmes au sein de son équipe, un programme électoral bien étoffé et une stratégie de communications enviable, la table semblait mise pour l’élection du tout premier gouvernement de la CAQ à l’Assemblée nationale.

Toutefois, les scandales de candidats individuels minent actuellement la confiance de l’électorat envers le parti de centre-droite. En effet, qui dit scandale, dit souvent « manque d’éthique », et cela semble être le thème central pour ces quelques candidats dont M. Legault aurait bien pu se passer. Que l’on parle du président du parti (et ex-candidat dans La Prairie) Stéphane Le Bouyonnec, de l’actuel député Éric Caire, ou de l’ex-candidat dans St-Jean, Stéphane Laroche, les derniers jours de campagne n’ont pas été faciles pour l’équipe caquiste. M. Le Bouyonnec a annoncé sa démission alors que les discussions reprenaient sur son implication dans une entreprise de prêts à haut risque (et hauts taux d’intérêts, d’ailleurs interdits au Québec) ; M. Caire, toujours en lice, s’est fait écorcher pour avoir accepté un prêt de 55 000 $, alors qu’il était député, d’un maire de sa circonscription ; M. Laroche, lui, a connu son « heure de gloire » alors qu’il fut révélé qu’il acceptait régulièrement que des mineurs fréquentent le bar local dont il est propriétaire, et que son établissement avait commis des infractions sanctionnées par la Régie des alcools, des courses et des jeux et avait contrevenu à la Loi sur l’équité salariale. La révélation qu’il eut aussi embauché, à deux reprises, un nain pour animer les festivités de « Nain-Jean-Baptiste » qu’il organisait n’était donc que la cerise sur le sundae.

Tout cela est bien dommage pour la CAQ, qui compte pourtant sur une bonne équipe de candidats et un programme électoral détaillé et réfléchi. Nous pouvons leur souhaiter que l’attention médiatique se tourne désormais davantage vers ses candidats compétents et la profondeur de ses engagements. En effet, les quelques promesses percutantes de la CAQ depuis le début de la campagne (la « Maison des aînés », l’augmentation des places en garderie, l’allocation familiale plus généreuse, etc.) ont vite été oubliées malgré leur impact potentiel sur la vie des familles québécoises.

''L’entre-deux : le Parti québécois (PQ) / 6 sur 10''

Cela faisait longtemps que le PQ n’avait pas débuté une campagne avec autant de retard dans les sondages sur ses principaux adversaires. Pire pour la formation de Jean-François Lisée, on sentait, vers la fin de l’été, que certains militants souverainistes se dirigeaient de plus en plus vers Québec solidaire. Contrairement au PQ, QS continue de promouvoir activement la souveraineté dans le cadre de la présente campagne.

Le PQ avait donc besoin d’un départ canon à ces élections, et, sagement, il a su miser sur l’audace et la clarté dans ses premières promesses électorales.

Que ce soit par ses publicités humoristiques à saveur auto-dérisoire (ex. : « La différence entre un péquiste et un dentiste ? Les deux en arrachent, mais travaillent pour votre bien »), ou bien par le design psychédélique de son autobus de campagne, la décision des stratèges péquistes d’« oser » semble bien fonctionner en début de parcours. Combinez à cela des engagements électoraux faciles à comprendre et, surtout pragmatiques, tels qu’un moratoire sur les projets de pétrole, le matériel scolaire gratuit pour les élèves, l’augmentation des congés parentaux, la facilitation du télétravail, etc., et l’on comprend mieux pourquoi le PQ arrive au tiers de la campagne mieux positionné qu’il ne l’était aux lignes de départ.

Jusqu’à hier, l’on aurait même pu prétendre que le PQ avait connu le meilleur début de campagne parmi les partis en lice. Or, la révélation de dernière heure que son candidat Guy Leclair est aujourd’hui formellement accusé de conduite avec les facultés affaiblies et de refus d’obtempérer à un ordre d’un agent de la paix vient naturellement assombrir le départ en force des péquistes.


Me Ryan Hillier est chef de la direction de NOVAlex, un cabinet d’avocats d’affaires et clinique juridique pro bono qu’il a cofondé en 2016, après avoir pratiqué au sein de deux bureaux nationaux et occupé la présidence de la Jeune Chambre de commerce de Montréal. Depuis ses premiers pas en politique en 2007, il a notamment été membre du Comité aviseur pour le Québec de l’ancien chef du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff, et l’un des membres fondateurs de la Coalition Avenir Québec, où il a conseillé le chef du parti, François Legault, au sujet des dossiers jeunesse.
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