Liaisons amoureuses au travail … liaisons dangereuses ?

Saviez-vous qu’en vertu du droit militaire canadien, le personnel des Forces armées déployé en mission doit, pour des raisons d’unité et de cohésion des troupes, éviter toute forme de «fraternisation» avec d’autres personnes au cours de cette période?

Cette règle s’applique même pour les militaires mariés déployés ensemble.

Gare à ceux qui enfreindraient cette règle: des écarts par rapport à ce code de conduite archi-rigoureux constituent des offenses sérieuses passibles de sanctions allant jusqu’à l’emprisonnement.

Soulignons à cet effet le cas du Brigadier Général Daniel Ménard, commandant des Forces armées canadiennes en Afghanistan, qui a été relevé de ses fonctions pour avoir entretenu une relation amoureuse avec une militaire qui se trouvait alors sous son commandement.

Le même sort fut réservé au Colonel Bernard Ouellette, chef d’état-major canadien responsable des forces militaires des Nations Unies en Haïti.

Ce ne sont pas des cas isolés, mais rassurez-vous le code de conduite militaire ne s’applique pas à la majorité des lecteurs de Droit-inc !

Qu’en est-il des lecteurs de Droit-inc ?

Œuvrant pour la plupart dans un environnement de travail susceptible de mener à des relations amoureuses, ils se doivent d’être conscients de leurs droits et obligations, un manquement en la matière pouvant entraîner un congédiement…

Obligations des employés

Le harcèlement est l’un des graves dangers pouvant résulter des liaisons amoureuses au travail.

Sans vouloir donner des conseils à mes lecteurs sur la façon de mener leur vie amoureuse, ce sont souvent les premiers pas d’une liaison amoureuse qui sont les plus délicats, que ce soit au niveau émotionnel ou juridique : les premiers émois cèdent la place aux cœurs brisés, ce qui peut être à la base d’une plainte pour harcèlement.

En effet, nos tribunaux ont reconnu que des avances non réciproques à l’égard d’un collègue de travail sont assimilables à du harcèlement.

Ainsi, il est primordial à la fois pour les employés et pour les employeurs de savoir reconnaître une situation potentiellement délicate dans laquelle un individu serait trop persévérant à l’endroit d’un(e) collègue de travail.

La prudence est également de mise dans le contexte d’une relation amoureuse qui tourne au vinaigre.

Il est fréquent dans ces situations que l’une des ex-parties exprime sa peine en se défoulant sur son ex-conjoint(e), ce qui peut encore une fois aussi facilement faire l’objet d’une plainte pour harcèlement.

Souvenez-vous de ce récent article de Droit-Inc illustrant une situation potentielle de harcèlement …

Du coté des employeurs

La Loi sur les normes du travail impose aux employeurs de prendre les mesures nécessaires afin de prévenir toute forme de harcèlement.

Notons d’entrée de jeu que, dans les cas de harcèlement qui impliquent des cadres et leurs employés subordonnés, ce rapport de force inégal ne sera pas bien perçu par les tribunaux dans le contexte d’une plainte déposée par l’employé contre son patron.

Nombreux sont donc les employeurs qui veulent agir préventivement, en instaurant des politiques pour limiter ou à tout le moins encadrer les relations amoureuses entre employés, particulièrement celles qui impliquent des personnes de niveaux hiérarchiques différents.

Alors que ces politiques aident à projeter une image de traitement égal entre collègues, celles-ci servent aussi à protéger employeurs et employés.

En effet, il tombe sous le sens qu’un cadre fréquentant un(e) subalterne ne soit pas la personne la plus objective pour décider de l’augmentation salariale de son partenaire!

À l’inverse, si la relation prend fin et que l’employé(e) subordonné(e) reçoit une mauvaise évaluation, le cadre pourrait être accusé(e) de subjectivité au cours du processus.

Au sein d’un cabinet d’avocats, pareils rapports de force peuvent se présenter.

Pensez à des relations entre étudiants et avocats ou entre avocats et associés. Elles peuvent aussi être assimilées à du harcèlement…

Au-delà de l’aspect juridique, les relations qui se terminent plutôt mal vont souvent avoir une incidence négative à l’intérieur du milieu de travail et affecter négativement la productivité et la qualité du travail, autre raison pour laquelle les employeurs mettent en place des politiques strictes afin de limiter le plus possible l’amour au travail.

La réalité est plus rose

Malgré toutes ces mises en garde, les romantiques ne devraient pas trop s’inquiéter puisque les relations amoureuses qui se nouent au travail finissent souvent très bien.

Et c’est bien heureux car le travail constitue un lieu de choix pour rencontrer quelqu’un qui partage un même style de vie et des passions communes, surtout quand les activités sociales du fait d’un travail prenant se réduisent à une peau de chagrin en début de pratique.

J’y vais quand même d’un bémol : les deux collègues-tourtereaux devront s’assurer de respecter une certaine limite quant à l’expression physique de l’affection qu’ils se démontrent au bureau.

Sachez que tout n’est pas permis.

Par exemple, citons le cas extrême de la décision arbitrale Services préhospitaliers Laurentides-Lanaudière ltée et Rassemblement des employés techniciens ambulanciers du Québec, D.T.E. 97T-586.

Cette décision fait état de la conduite d’un ambulancier syndiqué qui, par un bel après-midi alors qu’il était en fonction et qu’il portait son uniforme, a stationné son ambulance dans le stationnement d’une épicerie pour ensuite avoir une relation sexuelle avec une personne de sexe opposé dans une voiture située à proximité.

Le hic est que le tout se déroulait à la vue de familles et d’enfants qui circulaient dans le quartier!

Une plainte a été déposée et l’ambulancier a été congédié.

Un congédiement confirmé en justice.

A noter que pour l’arbitre, la visibilité du couple a constitué le motif déterminant, et non pas la relation sexuelle !

Et vous dans tout çà ? Avez-vous rencontré votre (ou vos!) partenaire(s) au travail? Avez-vous eu vent de récits croustillants de collègues qui se seraient retrouvé(e)s au travail dans des circonstances compromettantes?