"Je vous donne ma vérité", dit Milioto

La Presse Canadienne
2013-02-21 13:13:00

"Moi, je vous donne ma vérité, ma version de la vérité", lui a répondu M. Milioto.
La commission s'attarde, jeudi, aux relations que l'entrepreneur en trottoirs a entretenues avec des gens de la Ville de Montréal, notamment le chargé de projets Luc Leclerc, son supérieur Gilles Vézina et l'ancien directeur de la réalisation des travaux Robert Marcil. Les deux derniers ont même été invités au mariage de sa fille.
M. Milioto a nié avoir déjà donné de l'argent comptant à l'ingénieur chargé de projet Luc Leclerc, qui travaillait pour la Ville de Montréal dans les années 2000, au plus fort de la collusion.
L'automne dernier, M. Leclerc avait pourtant affirmé devant la commission avoir reçu de l'argent comptant "à plusieurs reprises" de la part de M. Milioto.
S'il en a reçu, ce n'est "pas de ma part", a répliqué M. Milioto jeudi. "Moi personnellement, je n'ai jamais donné d'argent." M. Leclerc a pu en recevoir de la part d'autres entrepreneurs, mais pas de sa part, a-t-il assuré.
M. Milioto a cependant concédé avoir donné à M. Leclerc des bouteilles de vin, des billets pour le tournoi de golf organisé par son association Cattolica Eraclea. Et il a admis lui avoir "envoyé" deux employés de Mivela, à ses frais, pour couler du béton chez lui, pendant trois ou quatre heures.
Il a aussi invité M. Leclerc au restaurant, afin de lui demander d'intercéder auprès de la Ville de Montréal, qui tardait à payer ses entrepreneurs, un mois après que les travaux aient commencé.
La procureure chef de la commission, Me Sonia Lebel, a alors présenté un relevé téléphonique des échanges entre MM. Leclerc et Milioto, démontrant que M. Leclerc l'a appelé 104 fois entre mai 2004 et septembre 2009.
"Il peut m'appeler pour mille et une choses", s'est exclamé M. Milioto.
Me Lebel a trouvé étrange que M. Milioto parle si souvent à M. Leclerc, d'autant plus qu'il avait témoigné plus tôt du fait que c'est surtout son ingénieur qui s'occupait de ces choses sur les chantiers, et non lui le président de l'entreprise.
Liste d'employés
M. Milioto a par ailleurs laissé tomber qu'il possédait une liste des noms et numéros de téléphone portable des ingénieurs et des surveillants de chantier de la Ville.
Selon lui, il s'agit d'une liste "officielle", mais la juge France Charbonneau a semblé trouver cela étrange. C'est "officiel pour moi", s'est-il empressé d'ajouter. "Ce n'est pas une chose qu'on avait en cachette."
La présidente de la commission lui a donc ordonné de remettre à la commission ce "cahier" avec les coordonnées d'employés de la Ville. M. Milioto a tout de suite précisé qu'il y avait déjà effacé certaines données, puisqu'il a pris sa retraite et ne faisait plus affaires avec ces gens.
Pas de collusion dans les parcs
M. Milioto a également nié avoir déjà suggéré à d'autres entrepreneurs d'organiser un système de collusion dans le domaine de l'aménagement des parcs, comme il en aurait existé un dans le secteur des trottoirs et des égouts.
Il a ainsi réfuté les propos tenus l'automne dernier par l'entrepreneur Michel Leclerc, de Terramex.
M. Leclerc avait soutenu que M. Milioto l'avait fait venir à son bureau et lui avait conseillé de s'entendre avec d'autres entrepreneurs du secteur de l'aménagement des parcs pour obtenir de meilleurs prix.
Terramex a tenté en vain de percer le marché montréalais, avant de se résigner à travailler en sous-traitance pour Mivela et d'autres entreprises du secteur des trottoirs.
M. Milioto a été identifié par d'autres témoins comme l'intermédiaire entre le clan des Rizzuto et le cartel des entrepreneurs en construction de Montréal. Il a lui-même témoigné de sa grande proximité avec le patriarche du clan, Nick Rizzuto, avec qui il jouait régulièrement aux cartes et faisait des promenades.