Le nouveau cercle d’influence des directeurs juridiques

Une plateforme nord-américaine débarque au Québec pour propulser les juristes d’entreprise au rang de véritables stratèges…

Le GC Collective, réseau destiné aux chefs des affaires juridiques, lance officiellement son chapitre québécois, sous la responsabilité de Me Sona Bedrossian, anciennement cheffe des affaires juridiques chez FlightHub et désormais conseillère juridique senior chez Mistplay, et Mes Jasmine Adhami et Marie-Christine Brochu.
Fondé par Paula Pépin, avocate québécoise vivant à Vancouver, le GC Collective est né d’une volonté de créer un réseau de soutien pour les chefs des affaires juridiques souvent isolés, et de leur offrir un accès privilégié au développement en leadership.
Ayant elle-même occupé le poste de cheffe des affaires juridiques, Me Pépin connaissait bien les défis uniques que comporte ce rôle et tenait à ce qu’aucun de ses pairs n’ait à l’assumer seul.
Depuis, GC Collective est devenu une communauté pancanadienne et nord-américaine regroupant des centaines de directrices et directeurs juridiques d’entreprises de toutes tailles et de tous secteurs.
C’est la rencontre entre Sona Bedrossian et Paula Pépin, lors d’un événement de l’Association of Corporate Counsel (ACC), qui a donné naissance au chapitre québécois et marqué l’expansion du réseau dans la francophonie canadienne.
Mais concrètement, quels services propose cette plateforme ? Et comment le rôle du chef des affaires juridiques a-t-il évolué ces dernières années ? On a jasé avec Me Bedrossian.
Quels services proposez-vous sur la plateforme et de quelle façon accompagnez-vous les directeurs des affaires juridiques dans leur rôle?
Il y a d’abord les rencontres mensuelles entre pairs, organisées par industrie ou par taille de département. Cela permet d’échanger sur des défis concrets et de trouver ensemble des solutions pratiques. Nous offrons des groupes spécialisés pour les entreprises dotées de petits, moyens ou grands départements juridiques. Des groupes sont également formés par domaine d’expertise.
Nous proposons aussi des ateliers de leadership animés par des coachs et facilitateurs expérimentés. L’ensemble du programme éducatif est axé sur le développement du leadership, en tenant compte des réalités uniques du rôle de directeur juridique, une dimension rarement enseignée dans notre pratique et pour laquelle nous avons tous besoin de soutien.
Les ateliers interactifs visent à développer des compétences essentielles comme la planification stratégique, la gestion du changement ou encore la gestion d’équipes performantes.
Ensuite, il y a nos forums privés en ligne, sécurisés et intégrés aux courriels, qui permettent d’obtenir rapidement des conseils pratiques de la part de ses pairs. Par exemple, un directeur juridique qui envisage une expansion en Europe peut poser la question à la communauté et bénéficier immédiatement de l’expérience de ceux qui ont déjà traversé ce processus.
En parallèle, nous organisons des rencontres de réseautage en personne chaque trimestre dans les grandes villes canadiennes, mais aussi à New York ou San Francisco, afin de créer des liens authentiques et durables.
En tant que responsable régionale du chapitre québécois de GC Collective, prévoyez-vous des initiatives spécifiques au Québec?
Pour l’instant, nos activités suivent une ligne directrice commune à l’ensemble des chapitres canadiens. Cela dit, le Québec a bien sûr ses particularités. Le contexte bilingue, par exemple, amène parfois des enjeux juridiques distincts et des discussions qui diffèrent de celles que l’on retrouve ailleurs au pays. Nous restons aussi très attentifs aux besoins exprimés par nos membres.
Si le chapitre québécois identifie des thématiques propres à notre réalité locale, comme, par exemple, les nouvelles exigences de l’OQLF, nous sommes tout à fait ouverts à organiser des séances ou des ateliers ciblés. En somme, même si les grandes orientations sont partagées à travers le Canada, nous voulons que le Québec ait un espace qui reflète sa réalité unique et réponde concrètement aux attentes de ses membres.
Vous évoquiez l’évolution du rôle du directeur juridique, qui passe de simple conseiller à véritable stratège aux côtés de la direction. Qu’est-ce qui explique cette transformation et ce rôle élargi?
La transition du directeur juridique d’un simple conseiller à un véritable stratège est une évolution que j’ai vécue de près et qui redéfinit notre rapport à l’entreprise. Ma proximité avec la haute direction m’a permis de voir à quel point le rôle transcende le cadre légal traditionnel. Il ne s’agit plus de se limiter à l’identification des risques, mais bien de calibrer la prise de risque pour servir les ambitions de croissance.
Pour y parvenir, il est essentiel d’agir en tant que partenaire d’affaires avisé pour les autres membres de l’exécutif. Particulièrement dans un secteur innovant comme la technologie, notre valeur ajoutée repose autant sur notre acuité commerciale que sur notre capacité à intégrer des technologies de pointe, comme l’IA, pour décupler l’efficacité de nos opérations.
Je m’efforce donc de toujours tisser des liens de confiance avec les différentes équipes et de faire de la fonction juridique un pilier central dans l’élaboration et l’exécution de la stratégie globale de l’entreprise.
Pour finir, selon vous, quelles sont les compétences clés pour devenir un véritable leader stratégique en tant que directeur juridique?
Pour moi, le leadership stratégique repose sur une philosophie simple que j’articule autour de trois piliers : l’équipe, la confiance et le temps.
Il ne suffit pas de parler le jargon juridique, il faut traduire nos conseils en données, en impact et en résultats concrets. L’objectif est de démontrer comment l’équipe juridique peut être un moteur d’efficacité opérationnelle.
Il faut également avoir une connaissance intime du modèle d’affaires. Cela signifie comprendre en profondeur le produit, l’expérience utilisateur et les dynamiques du marché. Sans cette immersion, nos conseils restent théoriques et perdent leur pertinence.
Bâtir un capital de confiance avec les autres dirigeants est aussi essentiel. Ceci est impossible sans une forte intelligence émotionnelle. L’écoute, l’empathie et la collaboration sont les fondations de ce partenariat.
Le meilleur indicateur de succès, c’est lorsque le directeur de l’entreprise vous consulte en amont d’un projet, non par obligation, mais parce qu’il vous perçoit comme un allié stratégique proactif. La réussite est toujours collective.