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Action collective : « Une menace existentielle pour la Fonderie », plaide Glencore

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Radio Canada

2025-05-15 13:15:46

Les avocats de Glencore ont tenté mercredi de convaincre le juge de ne pas autoriser l'action collective.

Me Michel Gagné - source : McCarthy


Les avocats représentant Glencore et la Fonderie Horne ont tenté mercredi de convaincre le juge Daniel Dumais de ne pas autoriser l’action collective visant l'entreprise et le Procureur général du Québec. Glencore estime que l’action collective visant la Fonderie Horne pourrait mettre en péril ses activités étant donné le montant important réclamé par les demandeurs.

L’avocat représentant l’entreprise, Me Michel Gagné, a rappelé que de nombreuses personnes vivent des activités de la Fonderie Horne dans la région et aussi à l’affinerie CCR de Montréal. Glencore et le gouvernement du Québec sont visés par une demande d’action collective, déposée par des citoyens de Rouyn-Noranda, qui souhaitent obtenir des dommages-intérêts pour ce qu'ils considèrent comme des préjudices subis par l’émission de contaminants dans l’air. Le montant réclamé représente quelques milliards de dollars, selon Glencore.

Les avocats des demandeurs ont fait plusieurs parallèles lundi entre le dossier de la Fonderie Horne et le cas de la population de Shannon. Le 17 janvier 2020, la Cour d’appel du Québec a condamné le gouvernement fédéral, la Société immobilière Valcartier et l'entreprise General Dynamics (devenue GD-OTS Canada inc.) à indemniser des résidents de Shannon qui avaient consommé de l'eau contaminée au TCE.

Glencore estime qu’il y a une différence importante entre ces deux dossiers. L’avocat de l’entreprise croit que les citoyens de Shannon ne pouvaient pas savoir que l’eau était contaminée.

« Ici, il y a toujours eu beaucoup d'information sur le fait que la Fonderie Horne émettait des émissions dans l’air », précise Me Gagné, ajoutant que la Fonderie décontamine les sols depuis le début des années 1990 dans le quartier Notre-Dame.

« Les gens qui voient leur terrain être décontaminé par la Fonderie ne peuvent pas ne pas être conscients que cette situation est causée par le fait qu’il y a des métaux dans l’air qui se déposent sur leur terrain », explique-t-il. Glencore estime, tout comme le gouvernement du Québec, que le délai de prescription de trois ans est dépassé dans ce dossier puisque les demandeurs connaissaient depuis plus de trois ans les impacts possibles des émissions de la Fonderie Horne.

Des conséquences « minimes » sur la santé

Glencore estime qu’une étude de biosurveillance réalisée chez les habitants du quartier Notre-Dame en 2005-2006 démontrait que ces émissions n’ont pas de conséquences sur la santé des citoyens de Rouyn-Noranda. Cette étude, qui visait à prélever des échantillons d’urine, arrivait à la conclusion que les résidents du quartier Notre-Dame n’étaient pas surexposés à l’arsenic. C’était aussi le constat du directeur régional de santé publique à cette époque. Leur avocat cite aussi une étude américaine de 1987 nommée Exposure to arsenic and respiratory cancer.

On y mentionne que l’exposition minimale à partir de laquelle on commence à voir une augmentation significative des cas de cancer serait de l’ordre de 2 000 000 nanogrammes par mètre cube d’air (ng/m3), soit 200 000 ng/m3 pendant 10 ans ou 100 000 ng/m3 pendant 20 ans (pour une exposition de huit heures par jour, cinq jours par semaine). Une étude de biosurveillance réalisée en 2019 arrive à une conclusion bien différente, soit que les enfants du quartier Notre-Dame sont surexposés à l’arsenic.

Cette fois, des échantillons d’ongles ont été analysés par la Direction régionale de santé publique. Glencore estime pour sa part qu’il y a eu des lacunes méthodologiques dans cette étude, comme le choix des ongles des mains comme biomarqueur. Les ongles présentent en effet un risque élevé de contamination externe.

Les demandeurs avaient cité lundi une étude de l’Institut national de santé publique (INSPQ) publiée en 2022 comme étant préoccupante. Celle-ci arrive à la conclusion que le risque de développer un cancer du poumon varie de 1 à 61 cas sur 100 000 pour l’ensemble de la ville de Rouyn-Noranda et de 1 à 87 cas sur 100 000 pour le quartier Notre-Dame uniquement.

L’avocat de Glencore estime pour sa part que cette étude représente une bonne nouvelle. « On a un calcul de risque théorique qui devrait être rassurant pour quelqu’un qui comprend les données. Ce n’est pas un risque réel, car on sait que c’est un risque surestimé et, malgré ça, ça donne des chiffres relativement rassurants », explique Me Michel Gagné. En fin de journée, l’avocat des demandeurs, Me Simon Pelletier, a tenu à prendre la parole pour mentionner que l’avocat de Glencore modifie les faits.

« Toute la journée, on a vécu dans un monde parallèle où la vérité a été distorsionnée par un avocat de la défense qui a fait dire ce qu’il voulait à la science, a-t-il précisé », en déclarant que l’INSPQ avait qualifié la situation de Rouyn-Noranda d'inacceptable.

Une action collective trop étendue?

Les avocats de Glencore se questionnent sur le fait que tous les citoyens vivant en milieu urbain à Rouyn-Noranda pourraient adhérer à l’action collective. Citant l’étude de la santé publique régionale en 2004-2005, Me Michel Gagné précise qu’on y mentionne que la moyenne annuelle d’arsenic dans l’air dans le quartier Évain à cette époque était sous 3 ng/m3. Les résidents du quartier d’Évain servaient d’ailleurs de groupe témoin dans cette étude.

On a une démonstration assez claire dans cette étude que le quartier Évain est une zone non exposée, explique Me Gagné. L’avocat de Glencore a aussi précisé que plus on s’éloigne de l’entreprise, moins il y a de métaux dans l’air. Il ajoute qu’un juge peut refuser une action collective s’il estime que le groupe visé est trop grand. Si le juge Dumais autorise l’action collective, Me Gagné estime que seules les personnes ayant résidé dans le quartier Notre-Dame devraient pouvoir y adhérer.

Les plaidoiries se poursuivent jeudi

Au cours de la journée de mardi, le gouvernement du Québec a pour sa part plaidé que les demandeurs, Julie Fortier et Miguel Charlebois, connaissent les risques pour la santé des émissions polluantes de la Fonderie Horne depuis plus de trois ans et que le délai de prescription est donc dépassé.

Le Procureur général du Québec estime que toute personne raisonnablement informée connaissait depuis plusieurs décennies la nature et les effets potentiels des contaminants émis légalement par la Fonderie.

Lundi, les avocats du cabinet Siskinds Desmeules, qui représente les demandeurs Julie Fortier et Miguel Charlebois, estimaient pour leur part que le gouvernement du Québec savait depuis plus de 40 ans que les émissions de la Fonderie Horne avaient des conséquences sur la santé des citoyens de Rouyn-Noranda et que l’information n’avait pas été diffusée à la population. Jeudi, chacune des parties aura une dernière occasion de convaincre le juge d’autoriser ou non le recours collectif. Le juge Dumais aura ensuite six mois pour rendre une décision.

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