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Amende de 110 000$ pour Transpavé

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L'équipe Droit-Inc

2008-03-17 13:29:00

Une première entreprise québécoise vient de recevoir une sentence pour négligence criminelle ayant causé la mort d’un travailleur en vertu de la Loi C-45 en vigueur depuis mars 2004.
Transpavé de Saint-Eustache devra payer une amende de 110 000$ pour négligence ayant mené au décès en 2005 de Steve L’écuyer, 23 ans.

Le juge Paul Chevalier de la Cour du Québec a prononcé la sentence ce matin au Palais de Justice de Saint-Jérôme. Il a accepté la recommandation commune pour une amende de 100 000$ effectuée en janvier dernier par la couronne et la défense, en plus d’ajouter une somme de 10 000$ pour raisons administratives.

Rappelons que l’homme de 23 ans est décédé le 11 octobre 2005, écrasé par une machine dont le système d’arrêt automatique avait été débranché. L’enquête a démontré la responsabilité de l’entreprise, qui a plaidé coupable en décembre 2007.

« La Loi C-45 a instauré pour les entreprises une nouvelle obligation en santé et sécurité au travail, distincte de la Loi sur la santé et sécurité du travail du Québec », a expliqué à lesaffaires.com, Pierre Pilote, expert en droit du travail chez Gowlings. Il ajoute que cette loi présente dans le Code criminel canadien prévoit des peines plus sévères que son équivalente québécoise.

Les organisations reconnues coupables de l’infraction de négligence criminelle ayant causé la mort d’un travailleur peuvent recevoir des amendes dont le montant maximum est illimité. Elles peuvent également être tenues responsables de la négligence de leurs dirigeants. La loi québécoise prévoit quant à elle des peines maximales de 50 000$.

La Loi C-45 prévoit également des peines individuelles. Par exemple, un dirigeant coupable de négligence ayant causé des blessures avec lésion peut recevoir une peine de dix ans de prison. S’il y a décès, le dirigeant peut être emprisonné à perpétuité. La loi québécoise ne prévoit aucune peine d’emprisonnement.

Il n’y avait pas de dirigeants mis en cause dans le cas Transpavé.

La Loi C-45 créait lors de son entrée en vigueur un devoir légal pour les entreprises de prendre des «mesures raisonnables» pour assurer la sécurité des travailleurs.

La FTQ est néanmoins furieuse de cette sentence.

"Le procureur de la couronne a bâclé son travail dans le dossier Transpavé en décrivant la compagnie comme exemplaire en matière de santé et sécurité alors que les constats de la CSST se multipliaient. Justice éclairée n'a certainement pas été rendue face à ce tragique incident qui aurait pu être évité", a déclaré ce matin Michel Arsenault, président de la FTQ, en réaction à la sentence imposée à l'employeur.

"Nous maintenons que des accusations criminelles doivent toujours être portées personnellement contre les dirigeants de Transpavé et non pas seulement contre l'entité corporative."

"Un rapport de la CSST nous révèle que ce sont des individus qui ont décidé de désactiver le mécanisme qui aurait permis de sauver la vie du jeune Steve L'Ecuyer et non pas un numéro de compagnie", a ajouté Michel Arsenault.

"Malgré la condamnation de la compagnie à 110 000 dollars, ses dirigeants considèrent toujours la santé et la sécurité des employés comme un irritant, comme un frein à la profitabilité des opérations. Seule une sentence exemplaire qui leur serait imposée personnellement pourrait leur faire comprendre à eux et à d'autres la valeur d'une vie. On ne se retrouverait peut-être pas à 200 travailleurs morts au travail a chaque année", a conclu le président de la FTQ qui doit étudier avec les conseillers juridiques les suites à donner à ce dossier."

Transpavé réagit
À la suite du prononcé de la sentence, Transpavé a réagi par communiqué:

Transpavé inc. a pris acte de la sentence que l'honorable juge Paul Chevalier, de la Cour du Québec, a rendue ce matin, à la suite des représentations sur sentence qui ont été faites le 26 février dernier ainsi que du plaidoyer de culpabilité que la compagnie avait enregistré, le 7 décembre 2007.

Comme elle l'a fait jusqu'à ce jour avec toutes les autorités concernées, la compagnie se soumettra au jugement du tribunal et respectera sa décision de lui imposer une amende de 100 000 $ et une suramende de 10 000 $.

De plus, Transpavé s'en tiendra à cette seule et unique déclaration :

"Transpavé inc. réitère d'abord ses regrets les plus sincères aux membres de la famille L'Ecuyer.

Au paragraphe 10 de son jugement, l'honorable juge Chevalier mentionne que "ni la compagnie ni aucun de ses employés n'étaient au courant que le levier de détection de plancher du convoyeur pouvait se coincer et se décoincer. Il existait un système de sécurité à faisceau optique pour limiter l'accès à l'endroit où l'accident s'est produit et c'est hors la connaissance de la compagnie ou de ses dirigeants qu'il avait été neutralisé lors de l'accident".

Au paragraphe 12, le Tribunal note également que "Transpavé n'a tiré aucun avantage du fait de la perpétration de cette infraction. Il n'y a eu aucune planification ou quelque préparatif que ce soit pour commettre l'infraction. (...) Ce n'est donc pas de façon active ou positive que l'entreprise a commis l'infraction, mais par inaction, de façon passive, sans planification".

Au paragraphe 26, le Tribunal précise que l'amende imposée "souligne l'importance de la reconnaissance, par Transpavé de sa faute et du sens des responsabilités qu'elle a manifesté par la suite".

Cette pénible épreuve, qui a bouleversé la direction et le personnel de la compagnie, a conduit à la mise en place d'une série de mesures, de concert avec le syndicat, les employés de Transpavé et les experts-conseils qu'elle a mandatés.

Au paragraphe 18 de son jugement, l'honorable juge Chevalier fait état du fait que "Transpavé a dépensé en 2006 au-delà d'un demi-million de dollars pour mettre ses usines à un niveau de sécurité européen, lequel est plus élevé que celui en vigueur en Amérique du Nord. C'est plus que ce que la CSST demandait, mais c'est pour s'assurer qu'un tel accident n'ait plus jamais lieu. En 2006 et 2007, l'entreprise a de plus effectué des dépenses directes de près d'un quart de million de dollars en investissements directs en santé et sécurité pour hausser le niveau de sécurité dans l'entreprise.

"Transpavé s'est conformée par ailleurs à toutes les recommandations de la CSST. En juin 2007, le Directeur santé et sécurité à la direction régionale des Laurentides tenait à "féliciter les deux parties, patronale et syndicales pour avoir réussi à implanter en moins d'une année une structure et une culture de gestion de la santé et de la sécurité correspondant à un standard de haut niveau"", d'ajouter le Tribunal, au paragraphe 19.

Bien que la compagnie ait la conviction que les mesures qui ont été prises, tout comme les nouvelles pratiques de santé et sécurité au travail en vigueur au sein de ses installations, permettront d'éviter la répétition d'un pareil drame, elle est consciente que les corrections apportées ne sauraient atténuer la douleur des proches de Steve L'Ecuyer.

Consciente également des responsabilités qui lui incombaient de constater une défaillance grave dont elle aurait dû se rendre compte, Transpavé a tiré les leçons de cette négligence déplorable et pris les moyens requis pour ne plus avoir à déplorer d'autres accidents sur ses lieux de travail.

A cet égard, la compagnie réitère également ses excuses à tous les membres de son effectif qui ont été affectés par ce malheur, de même que son engagement à travailler avec eux à l'amélioration continue de pratiques de santé et de sécurité exemplaires."
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