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Réforme de l'adoption: Débat universitaire

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Emeline Magnier

2013-08-06 13:15:00

Alain Roy, professeur à l'Udem, et Edmund Coates, avocat et chercheur à McGill, ont des positions opposées sur la réforme du droit de l'adoption, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale…
Le projet de loi 47 intitulé Loi modifiant le Code civil et d’autres dispositions législatives en matière d’adoption, d’autorité parentale et de divulgation de renseignements prévoit une refonte de la procédure de prise de contact entre l'adopté et les parents d'origine.

Instauré dans les années 80, le système actuel permet à l'adopté ou aux parents d'origine de s'adresser au Centre de jeunesse pour être mis en contact avec la partie recherchée. Cette dernière a alors la possibilité de refuser la divulgation de son identité, alors que l'adopté peut disposer d'un sommaire des ses antécédents sociaux et biologiques.

La réforme prévoit une refonte de cette procédure.

Un veto de divulgation interdisant de révéler l'identité sera automatiquement enregistré pour l'adopté alors que l'adoptant devra pour sa part, faire une demande dans les 18 mois de la mise en vigueur de la réforme pour bénéficier de cette protection.

S'ils ne l'ont pas fait et que l'adopté entreprend des démarches en vue des retrouvailles, les parents d'origine pourront alors opposer un veto de contact, qui devra être respecté par l'adopté sous peine d'amende.

Edmund Coates considère que ce projet de loi menace l'équilibre existant entre les adoptés et les parents d'origine.

Selon Alain Roy, professeur à l'Udem, le projet de loi
Selon Alain Roy, professeur à l'Udem, le projet de loi "ne menace pas l’équilibre, il a plutôt le mérite de le rétablir un tant soit peu"
"Certaines de ses dispositions porteraient atteinte à des promesses données aux parents d’origine. Les conséquences blessantes qu’elle imposerait à d’anciennes filles-mères, une population éparpillée, fragilisée et sous-représentée, sont particulièrement inquiétantes", dit-il dans un article paru dans Le Devoir le 26 juillet dernier.

"Il est permis de présumer que la plupart des parents d’origine n’entreprendront pas l’inscription d’un veto, y compris ceux qui souhaiteraient demeurer inconnus. Sauront-ils même que l’ancienne protection a été retirée, avant qu’il ne soit trop tard?", s'interroge l'avocat.

Selon lui, cette nouvelle procédure fait fi "des deux histoires douloureuses qui se rencontraient jadis dans une grossesse et une naissance hors du mariage".

"Les parents d’origine, surtout les mères d’origine, ont parfois vécu des histoires déchirantes. Exiger qu’elles entreprennent l’enregistrement d’un veto, c’est exiger qu’elles affrontent de nouveau leurs cicatrices émotionnelles, après avoir acquis une certaine paix au fil des années", poursuit-il.

"Le législateur doit faire preuve d’encore plus de réflexion et de prudence lorsqu’il propose de modifier unilatéralement des promesses de secret qui sont en place depuis des décennies", conclut Me Coates.

Le professeur Roy ne partage pas le même avis. D'après lui, le projet de loi "ne menace pas l’équilibre, il a plutôt le mérite de le rétablir un tant soit peu", peut-on lire dans sa réplique parue le 1er août dans Le Devoir.

Si le droit à la vie privé des parents d’origine importe, la quête identitaire de l’adopté compte tout autant. Il s'agit d'après le professeur, d'un besoin fondamental, reconnu par de plus en plus de pays dans leur loi constitutionnelle.

"La personne adoptée qui veut connaître l’identité de ses parents d’origine ne cherche ni à s’introduire dans un environnement familial qui n’est pas le sien, ni à remplacer sa famille d’adoption, ni à satisfaire une simple curiosité. En voulant s’approprier son passé et ses origines, l’adopté cherche simplement à satisfaire un profond besoin humain", explique-t-il.

Selon lui le secret ne saurait être une solution."Plutôt que de maintenir le tabou et de laisser ces femmes mourir avec leur secret, comme si leur geste était répréhensible, ne devrait-on pas envisager leur passé avec ouverture et transparence? Une telle perspective ne serait-elle pas plus socialement responsable et plus respectueuse des principales concernées?".
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