Un nouveau géant en Immigration

Élisabeth Fleury
2025-07-29 15:00:02
Immétis s’empare d’Auray Sourcing Immigration et ajoute 200 entreprises clientes à son carnet. Comment cette transaction va bouleverser le marché de l’immigration d’affaires?

Immétis, chef de file en immigration d’affaires, fait l’acquisition d’AURAY Sourcing Immigration, marquant une nouvelle étape dans son expansion, a appris Droit-inc.
Cette acquisition permettra à la filiale du Groupe TCJ, composé des entreprises Therrien Couture Joli-Cœur, Edilex et OnRègle, de renforcer sa présence dans plusieurs régions du Québec et d’augmenter sa capacité à traiter un volume élevé de demandes dans un environnement migratoire complexe, se réjouit Immétis.
Avec cette intégration, Immétis enrichira son portefeuille du tiers, soit environ 200 nouvelles entreprises clientes principalement situées en Montérégie, en Chaudière-Appalaches, en Estrie, dans les Laurentides et dans Lanaudière dans des secteurs aussi variés que l’hôtellerie et la restauration, le manufacturier et les technologies de l’information.
Pour Me Natacha Mignon, cheffe de la direction d’Immétis, cette intégration est une « union naturelle » entre deux acteurs qui partagent la même vision. Droit-inc s’est entretenu avec elle.
Quand et comment les discussions avec AURAY ont commencé?

J’ai l’habitude de parler avec les gens dans le milieu de l’immigration, et j’ai approché AURAY Sourcing Immigration, ce sont des gens que je connaissais. L’acquisition a été un long processus qui a duré environ six mois.
Qu’est-ce qui a motivé cette acquisition?
Je crois beaucoup à l’immigration. En 2022, l’immigration, on ne parlait que de ça, les programmes s’ouvraient. Aujourd’hui, tant au fédéral qu'au provincial, les programmes se referment, les règles se resserrent, le discours est qu’on veut moins d’immigrants.
Malgré ce contexte très conjoncturel, moi je crois que le Canada va continuer à se bâtir sur l’immigration, c’est une conviction profonde que j’ai. Imaginez n’importe quelle entreprise aujourd’hui, et enlevez-leur leurs travailleurs immigrants… Il n’y a pas une entreprise au Québec qui fonctionne sans travailleurs étrangers.
Alors oui, il y a un resserrement des règles actuellement, mais j’ai la conviction que l’immigration va se poursuivre. On a des clients qui nous suivent, on est devenu un cabinet extrêmement organisé et — je vais toucher du bois — on ne souffre pas de la crise actuellement. Nous avons une belle progression.
Comment le fait d’être une filiale de TCJ a influencé cette acquisition?
Ça m’a donné des ailes. Je pense que toute seule, il y a des moves que je n’aurais pas osé faire.
Il doit y avoir un fit avec l’entreprise qu’on reprend, mais il faut aussi qu’il y ait un fit avec son actionnaire. Et j’ai la chance aujourd’hui d’avoir un actionnaire qui me donne des ailes. Quand je lui propose un projet qui a du sens, il m'écoute, et après analyse, il pense que ça vaut le coup d’aller de l’avant.
En quoi Immétis et AURAY, c’est une union naturelle?
On a exactement la même pratique. Cette union est une façon pour Immétis de consolider le marché. AURAY Sourcing Immigration était beaucoup plus présent que nous en région, et aujourd’hui, les régions, malgré le discours politique, ont besoin de travailleurs étrangers. Et moi je veux qu’on soit plus implanté en région.
Quels sont les secteurs qui souffrent le plus de la pénurie de main-d’oeuvre?
Tous les secteurs souffrent. Je pourrais nommer l’éducation, le manufacturier, l'hôtellerie et la restauration, mais nous avons des clients dans tous les secteurs qui souffrent.
S’il faut faire une gradation, les secteurs qui souffrent peut-être un peu plus sont ceux qui ont été le plus impactés par les restrictions des possibilités d’obtenir un nouveau permis, donc principalement les bas salaires. Vous avez des régions dans lesquelles c’est carrément interdit d’obtenir des nouveaux permis, et quand ça ne l’est pas, ils sont renouvelés pour un an.
Aujourd’hui, des entreprises ont du mal à fonctionner à cause du manque de personnel. On parle beaucoup de pénurie de main-d’oeuvre, mais peut-être que ce n’est pas une pénurie de main-d’oeuvre, mais plutôt une inadéquation entre la main-d’oeuvre disponible et la main-d’oeuvre dont ont besoin les entreprises.
Comment Immétis et Auray vont s’intégrer ensemble?
Moi, je les aime déjà, et j’espère qu’ils vont nous aimer autant! J’espère qu’on va leur offrir un cadre qui va les séduire et dans lequel ils vont s’épanouir. Ils arrivent dans une entreprise qui est ultra spécialisée, donc ça a du bon pour eux.
L’énorme chance que j’ai, c’est de les accueillir dans un contexte où, il y a deux ans, j’ai fait un saut dans l’inconnu en cédant mon entreprise au groupe TCJ et en ne sachant pas trop comment ça allait se passer. Là, j’ai ce retour d’expérience, je sais ce que j’ai aimé de l’accueil que m’a fait mon actionnaire, et c’est quelque chose que je vais essayer de reproduire pour que la magie opère.
Quant aux clients, ils gardent les mêmes professionnels qui s’occupaient d’eux, et ils arrivent dans une équipe qui est plus grosse avec une spécialisation de pointe dans le domaine de l’immigration d'affaires. Je n’anticipe pas de difficultés de ce côté-là.
Quelle place occupe la technologie chez Immétis?
Groupe TCJ est un cabinet très entrepreneurial et très technologique, Immétis, c’est pareil. On a cette capacité technologiquement à prendre beaucoup plus de volume, et on va avoir toute l’équipe d’AURAY Sourcing Immigration pour les traiter à partir de nos outils technologiques qu’on a mis en place depuis quand même pas mal d’années.
Immétis est un cabinet qui s’est monté en 2016, et c'était plus facile de partir de rien que de se mettre à niveau. En 2016, quand j’ai fondé le cabinet, j’ai développé des systèmes à l’interne de collection des données, et nous avons été un bureau sans papier dès notre constitution. À partir de là, on n’a fait qu’ajouter de la technologie, qui s’est greffée à une base technologique. Tout se fait en ligne, avec un système d'archivage.
Quel est le volume de demandes que vous allez pouvoir traiter grâce à cette acquisition?
Ça me gêne de parler de ça, je n’aime pas que les clients aient l’impression d’être des numéros, des chiffres. Disons qu’on va pouvoir traiter un tiers plus de demandes.
Quelles sont vos priorités pour les 90 premiers jours post-acquisition?
Ce sera d’abord d’intégrer l’équipe, de faire en sorte que l’équipe se sente bien chez nous. À partir de là, tout le reste suit. Il faudra aussi assurer la transition avec la clientèle, puis monitorer pour s’assurer d’uniformiser les pratiques.
Ensuite, on pense à l’avenir. Ce sera, je pense, une belle opération humaine et commerciale. Pour moi, TCJ, c’est le cabinet qui a le plus gros potentiel de développement au Québec. Je me trouve chanceuse, c’est deux ans d’une belle histoire.
Quels indicateurs allez-vous suivre pour vous assurer que vous avez réussi votre pari?
Je vais regarder l’évolution de la clientèle et la progression de l’équipe.
Qu’est-ce que vous voudriez voir évoluer du côté des gouvernements pour faciliter l’immigration économique?
Il y a un enjeu de rétention sur les programmes d’immigration permanente. C‘est rendu très compliqué qu’un travailleur étranger ait un accès rectiligne vers la résidence permanente. L’attractivité du Canada, c’était: tu trouves un travail, puis ton conjoint ou ta conjointe va être en mesure de travailler, ensuite toute la famille a une voie rectiligne pour obtenir la résidence permanente. Mais tout ça, en ce moment, ce sont des principes qui sont battus en brèche.
Ce que j’ai envie de dire aux gouvernements, c’est: écoutez les avocats qui travaillent dans le domaine, écoutez les entreprises, les industries, les organismes qui les représentent. Nous sommes tous là à dire qu’il y a des besoins de main-d’oeuvre.
C’est quoi l’avenir pour Immétis? D’autres acquisitions en vue?
Je ne m’interdis rien, mais je ne m’impose rien non plus. Je réfléchis, je regarde comment notre activité évolue, se transforme, et à un moment, je peux avoir des idées, des envies, des intérêts qui « popent », mais je n’ai aucun objectif de grossir à tout prix. C’est dur un match, que tout le monde s’entende bien. On a cela en ce moment, on a de la chance. Je ne veux pas grossir à tout prix.