Une veuve peut garder les 102 789 $ que réclamait l’ARC…

Radio-Canada Et Cbc
2025-01-27 14:15:36

Une veuve albertaine pourra conserver les dizaines de milliers de dollars que son mari décédé lui a laissés en épargne-retraite, après avoir remporté une longue bataille judiciaire contre l'Agence du revenu du Canada (ARC).
Selon une décision de la Cour d'appel fédérale, mardi, Marlene Enns est exemptée d’une clause du régime fiscal canadien qui donne à l’ARC le droit de recouvrir des dettes d’impôts non payés de maris ou de conjoints de fait dans certains cas, car selon la loi, son mariage a pris fin dès la mort de son mari.
« Une personne est seulement considérée comme étant un conjoint durant la période où cette personne a été mariée, écrit le juge. Par conséquent, lorsqu’un mariage se conclut, cette personne n’est plus considérée comme conjoint ».
Cette décision règle une question qui n’a pas eu de réponse claire depuis plusieurs années. En effet, d'autres cas concernant des veuves qui s'étaient présentés devant la Cour canadienne de l'impôt se sont conclus par des réponses contradictoires devant ce que devrait être la définition d’une femme ou d'un mari dans des cas comme celui de Marlene Enns.
Près de 150 000 $ en impôts
Ce cas spécifique tourne autour du REER amassé durant 40 ans par le mari de Marlene Enns, Peter Enns. Ce dernier ayant désigné sa conjointe comme seule bénéficiaire de son compte, 102 789 $ ont été transférés à cette dernière à sa mort.
Cependant, quatre ans plus tard, l’ARC a déterminé que Peter Enns devait près de 150 000 $ d'impôt sur le revenu, qu'il n'avait pas payés, selon l'article 160 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Selon cet article, une personne qui reçoit des biens de ses proches, comme des amis ou sa famille, pour une valeur inférieure à la juste valeur marchande, peut être tenue responsable de la dette impayée.

« Dans ce cas, l'ARC a dit : 'Eh bien (Madame), vous avez reçu ces REER sans aucun produit, et votre mari était redevable de l'impôt au moment de son décès. Alors, maintenant, c'est aussi votre problème fiscal’ », explique l’avocate Lori Bokenfohr qui n’est pas associée au cas de Marlene Enns, mais qui est spécialisée dans le droit fiscal.
L’argument de Marlene Enns et de ses avocats étaient que l’ARC ne pouvait pas utiliser l'article 160 pour percevoir le montant parce que la définition de conjoint n’inclut pas celui de veuve.
Plusieurs avocats, dont Lori Bokenfohr, disent que cette décision est importante pour créer un précédent avec un outil de l’ARC, qui l’utilise afin de tenir certaines personnes responsables de la dette fiscale d'une autre personne dans certaines circonstances.
« Les membres de la famille s'offrent constamment des cadeaux. Il n'est pas nécessaire d'être riche pour avoir un problème au titre de l'article 160 », ajoute-t-elle.
Répercussions et définitions
Autrement dit, d'après la Cour d'appel fédérale, un conjoint est défini comme une personne mariée. Toujours par définition, un mariage prend fin dès que l'un des conjoints décède. Marlene Enns n'était donc pas une « conjointe » lorsqu'elle a hérité de l'épargne-retraite, puisque son mari était décédé.
Le tribunal a déclaré que cela signifiait que l'ARC ne pouvait pas utiliser l'article 160 pour recouvrer les sommes dues par Marlene Enns et régler les dettes de son mari. Il a également ordonné à l'ARC de payer ses frais de justice.
Dans un courriel à CBC, l'agence fiscale a déclaré qu'elle ne pouvait pas commenter « les détails spécifiques des affaires judiciaires », parce que des clauses de confidentialité empêchent les fonctionnaires de divulguer des informations sur les contribuables.