Propriété intellectuelle et financement : où publier les sûretés?

Charles-Antoine Bilodeau Et Kristina A. Fundaro
2025-09-22 11:15:15

Lors d’un financement, les prêteurs exigent souvent que les droits de propriété intellectuelle doivent être grevés d’une hypothèque mobilière. Pour que cette hypothèque soit opposable aux tiers, une question se pose fréquemment, est-ce que la publication au Registre des droits personnels et réels mobiliers (RDPRM) est suffisante ou faut-il la publier au registre de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (aussi connu sous l’acronyme « OPIC »)?
Ce qu’il faut savoir :
Au Québec, la propriété intellectuelle est considérée comme un bien meuble incorporel. Pour qu’une sûreté soit opposable aux tiers, elle doit être publiée au registre approprié. La publication au RDPRM suffit pour rendre l’hypothèque mobilière opposable. En effet, la doctrine est constante à l’effet qu’un prêteur ne peut pas se fier uniquement au registre de l’OPIC lors de sa diligence raisonnable pour déterminer si ces droits font l’objet d’hypothèques antérieures.
En regard d’un conflit potentiel entre une publication à l’OPIC et celle au RDPRM, la doctrine est aussi d’avis que l’enregistrement des droits de propriété intellectuelle à l’OPIC n’a pas d’impact sur la création, l’inscription ou la priorité des biens hypothéqués en vertu des dispositions du Code Civil du Québec.
Quelques nuances importantes :
Bien que l ’OPIC permette l’enregistrement d’hypothèques sur son registre public, cela n’est généralement pas requis pour assurer l’opposabilité de la sûreté.
Les droits de propriété intellectuelle sont limités dans le temps : brevet (20 ans), marque de commerce (10 ans), dessin industriel (10 ans), droit d’auteur (vie de l’auteur + 50 ans). Une hypothèque ne peut survivre à l’extinction du droit qu’elle grève. Il est donc important de consulter le registre de l’OPIC afin de confirmer si le droit existe et pour encore combien de temps et, par la suite, consulter le RDPRM afin de s’assurer qu’aucune hypothèque ne grève déjà ce droit.
La doctrine recommande, par précaution et en raison des incertitudes entourant l’interaction entre les différents régimes, d’effectuer un double enregistrement des sûretés (OPIC et RDPRM). Cette approche est généralement préférable pour les créanciers hypothécaires afin de maximiser la sécurité juridique.
Cet article a été publié à l’origine sur le site de KRB.
À propos des auteurs
Charles-Antoine Bilodeau est stagiaire du Barreau chez KRB.
Kristina A. Fundaro est avocate au sein du groupe de droit bancaire et financement de KRB.