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Ne pas tout déléguer à l’IA : ce cabinet sensibilise ses clients

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Camille Dufétel

2023-05-03 13:15:00

Un cabinet montréalais sensibilise ses clients à l’importance de ne pas déléguer trop vite leurs besoins à des applications d’intelligence artificielle... Lequel ?

Me Golmehr Attaran. Source: Facebook
Me Golmehr Attaran. Source: Facebook
Les différents outils d’intelligence artificielle qui ont le vent en poupe actuellement, comme ChatGPT, sont peut-être bien utiles pour répondre à des questions et faire de la rédaction, entre autres... mais encore faut-il savoir les utiliser correctement et avoir conscience de leurs limites.

Au sein du cabinet Avens Montréal, qui fête ses quatre ans d’existence, on conscientise en tout cas ses clients sur ce plan.

Des tee-shirts ont même été distribués à plusieurs d’entre eux avec l’inscription « My lawyers are better than any IA ». En français, « Mes avocats sont meilleurs que n’importe quelle intelligence artificielle ».

Me Golmehr Attaran, associée chez Avens Montréal, qui se spécialise en litige commercial et en droit des affaires, a expliqué la démarche du cabinet à Droit-Inc.

Vous sensibilisez vos clients sur les limites du recours à l’intelligence artificielle et avez même lancé votre gamme de tee-shirts à ce propos ! D’où est partie cette idée ?

Effectivement, j’ai des clients qui depuis un certain temps, nous disent « bon, les avocats, vous allez vous recycler dans quoi ? ». La question qu’on se pose, c’est « est-ce que les clients, les entrepreneurs, veulent vraiment remplacer leurs avocats par des outils technologiques ? ».

Il faut savoir que dans notre domaine, on représente entre autres des entrepreneurs qui sont vraiment des « leaders », des personnes déterminées, passionnées, créatives, mais surtout courageuses. Elles se lancent sur ces outils et sont prêtes à prendre des risques.

De mon côté, mon rôle est de les soutenir dans leurs démarches et aventures, mais en étant toujours le son de la cloche. Je les amène à prendre des décisions éclairées pour qu’ils connaissent les risques associés à leurs décisions d’affaires.

Quand quelqu’un me dit carrément « Me Attaran, j’ai commencé à utiliser l’intelligence artificielle », que ce soit ChatGPT, Early Birds ou Google Bard, ce que je comprends, c’est que l’entrepreneur essaie d’être de plus en plus efficace. D’être plus rapide, d’avoir de meilleurs résultats ou même de fournir de meilleurs services, en diminuant les coûts.

L’objectif est d’avoir un avantage concurrentiel sur le marché. Mais il faut savoir que ces outils sont nourris à travers l’information qu’on leur donne. C’est vraiment ce qu’il y a sur Internet. Il faut se demander si ce qu’il y a sur Internet est fiable, s’il y a violation de droits d’auteurs et de vie privée.

C’est là-dessus que vous essayez de les conscientiser ?

C’est là qu’on essaie de dire aux entrepreneurs de faire attention. Il faut être conscient de certains points importants avant de prendre la décision de s’embarquer dedans ou de remplacer carrément les avocats, ce dont je doute.

Que viennent-ils chercher sur ces outils ? Des conseils juridiques ?

Non, pas des conseils juridiques, mais ça peut être par exemple la rédaction d’une mise en demeure. Il faut faire attention, car Madame et Monsieur « Tout le monde » qui met ses informations sur un de ces outils, doit savoir quoi fournir comme contexte.

Les avocats, avec l’expérience, l’éducation, les formations, et tout leur bagage juridique, peuvent cerner les points les plus importants. Tout le monde ne peut pas faire cet exercice. Si on n’a pas fourni toute l’information pertinente à la machine, on ne peut pas s’attendre à une réponse valide et conforme à la loi applicable.

L’information fournie doit être la bonne et elle doit être pertinente. Quand la réponse est reçue, les avocats ont les outils pour faire une vérification de celle-ci.

Il faut trouver le juste milieu entre le fait de ne pas manquer le bateau sur le plan technologique, mais trouver aussi une manière pour se protéger.

Je rappelle entre autres que le commissariat à la protection de la vie privée est en train de faire une enquête sur ChatGPT, à la suite d’une plainte…

Si ces outils nécessitent peut-être de prendre encore du recul sur leur utilisation pertinente, vous inquiètent-ils réellement par rapport à votre profession ?

Non, je suis même contente de leur arrivée. Car nous-mêmes, en tant qu’avocats, on cherche à s’améliorer tous les jours. On suit des formations, des conférences, dans l’objectif de bien représenter nos clients.

Ce sont vraiment des outils qui vont pouvoir nous aider. Et nous, on a le bagage juridique, donc on peut s’assurer que l’information fournie a de l’allure.

Dans la mesure où l’on fait cette vérification, on peut l’utiliser comme un outil, aussi bien pour les avocats que les recherchistes ou les parajuristes. C’est vraiment quelque chose qui va nous aider.

Peut-être qu’à long terme, dans quelques années, ce sera tellement intelligent que ça pourra remplacer potentiellement, et dans certaines circonstances, des services juridiques.

Mais ça ne pourra pas nécessairement s’asseoir avec le client, comprendre son objectif, faire la stratégie du dossier avec lui…

Comment est venue l’idée des tee-shirts ?

C’est un clin d’œil qu’on fait à certains de nos clients pour leur dire qu’on « on sait que ça n’arrivera pas, en tout cas pas tout de suite et peut-être même jamais » !

Il faut juste commencer à regarder ça et à savoir dans quelles circonstances on veut utiliser ces outils, sans en faire aveuglément une référence.

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1 commentaire

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 10 mois
    Le retour des experts en "toute" combiné à l'envie de se faire peur
    Dans le Journal de Montréal, un des "cerveaux" de service invite à légiférer afin que le tir d'armes nucléaires ne soit pas confié à l'IA.

    Après les "experts en toute" de la période covid, les médias vont nous saouler avec ceux qui parlent d'IA, et dont la feuille de route est tout aussi vide que les précédants.

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