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Me Harvey clame son innocence…pour la première fois

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Stéphane Tremblay

2022-11-28 10:15:00

Se disant persécuté par le Conseil de discipline, l’avocat de Québec a décidé de clamer publiquement son innocence pour la première fois…

Me Stéphane Harvey. Source: Site web de Blanchard Avocats inc.
Me Stéphane Harvey. Source: Site web de Blanchard Avocats inc.
Me Stéphane Harvey dit en avoir assez de vivre avec une épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête.

Il a accordé une longue entrevue à Droit-inc dans laquelle il présente sa «preuve» de non culpabilité. Pour sa défense, il a également remis une bible de documents en plus d’y aller de déclarations incendiaires. Des ordonnances de non publications empêchent le dévoilement du nom des victimes.

« Je ne suis pas coupable », a d'abord lancé Me Harvey.

L’avocat de 32 ans de métier, qui fait face à trois plaintes, a été reconnu coupable de 10 chefs d’infraction par le Conseil de discipline, en avril dernier.

Son ordre professionnel le blâme de s’être approprié des montants détenus dans le compte en fidéicommis d’un client, d’avoir placé des sommes d’un client dans le compte privé du cabinet alors qu’elles devaient être déposées dans un compte en fidéicommis, d’avoir intimidé un client qui voulait connaître le montant restant dans le compte, d’avoir entravé l’enquête du syndic, d’avoir contrefait les initiales d’un de ses clients sur une fausse facture, de s’être retrouvé en conflit d’intérêt lors de l’envoi d’une mise en demeure et d’avoir demandé un bonus après une victoire.

« Je considère avoir été condamné à tort et entends bien aller jusqu’au bout des choses », répond l’avocat, soulignant que toutes ses déclarations reflétant son état d’âme sont des éléments qui ont déjà été communiqués lors des audiences au Conseil.

Il croyait pouvoir acheter les juges

Dans la première plainte, entendue devant le Conseil, toujours en cours, le plaignant est une personne d’origine étrangère. Une histoire comportant une entente d’un mandat à portée limitée avec des services juridiques selon les honoraires conditionnels.

« J’ai un courriel officialisant l’entente de retainer et qui comporte l’ensemble des mentions légales nécessaires. »

« Parfois avec un retainer, on est gagnant, d’autres fois, on est perdant. C’est un prix forfaitaire, peu importe le nombre d’heures passées, le prix du départ établi pour défendre ce dossier ne change pas. Dans le cas présent, je suis perdant ayant travaillé pour 150 000$ de temps selon la preuve faite devant le Conseil, mais en réalité je n’ai facturé que pour 50 000$ ».

Me Harvey souligne que ce client, étranger au Canada et au système de justice occidental, « croyait que les sommes d’argent garantissaient des résultats. Dans certains courriels, il semble croire qu’il est d’usage d’acheter les juges », plaide Me Harvey.

Il est mort

Dans la seconde plainte, l’ex-client est décédé. « On continue de s’acharner malgré la mort du psychologue plaignant, lui-même condamné dans le passé par son ordre professionnel ».

« À court de témoin, Me Nathalie Lavoie, (syndic ad hoc), essaie de faire parler un mort à travers les audiences. C’est vraiment pitoyable comme procédé », déplore vigoureusement Me Harvey.

L’avocat natif de la Côte-Nord estime que l’enjeu est de « 5000$ ». En date du 21 août 2020, « Me Lavoie et son cabinet étaient rendus à 125 000$ pour analyser ma facture de 5000$ dans ce dossier », enchaîne-t-il précisant avoir tenté d’obtenir par le Barreau du Québec les montants actualisés, en novembre 2022, mais peine perdue.

« Une vulgaire farce et le Barreau paie sans se poser de question », dénonce celui qui se dit aussi opprimé, de façon « injuste et cruelle ». Il va jusqu’à dire que le Barreau utilise tous les moyens « même illégaux » pour le radier.

Il y a 12 ans

Dans la dernière plainte, Me Harvey parle encore d’entêtement, lui qui n’a pas fini d’en découdre avec son ordre professionnel. « Une cause qui date de 2010 dans laquelle le client après avoir reçu des services irréprochables renie sa signature et réclame son argent », explique l’intimé.

Sauf que cette histoire est plus complexe et plus litigieuse, impliquant une adolescente à l’époque et son oncle, son père venant de mourir.

Me Stéphane Harvey est ainsi mandaté par l’oncle, le liquidateur de la succession, qui se trouve être le frère du défunt. Ce dernier avait désigné sa fille comme unique bénéficiaire de sa police d’assurance vie, au montant de 170 000 $.

La somme est alors placée dans un compte en fidéicommis. Au départ, selon le plaignant, Me Harvey aurait fixé ses honoraires à 10 000$. Les frais d'avocats ont plutôt grugé 65 000 $, soit le tiers de l’héritage.

Dans un deuxième temps, l’homme donne un second mandat à Me Harvey, celui de gérer la pension alimentaire mensuelle destinée à la mère de l'héritière. Finalement, la contestation du testament sera abandonnée sans mesure judiciaire. Me Harvey estime avoir tout de même effectué du travail pour lequel il doit être rémunéré, justifiant ainsi les retraits effectués dans le compte.

Le plaignant demandera et obtiendra le montant de 75 000 $ qu'il souhaite déposer dans un autre compte pour faire fructifier l’argent avec les intérêts.

Me Harvey mentionne que 4 ans plus tard, le client demandera à maintes reprises un suivi de l’argent dans le compte en fidéicommis.

Exaspéré d’être talonné par son ancien client, Me Harvey lui remettra une mise en demeure, disant être victime de propos diffamatoires. Il exigera des excuses sans quoi il lui réclamera 50 000 $.

Le Conseil n’a pas aimé. « Au lieu de fournir les précisions demandées, quant à la gestion du compte, l’intimé choisit de le mettre en demeure. Il ne faut pas perdre de vue que l'argent confié à l'intimé en fidéicommis ne lui appartient pas. Lorsqu’un client demande de rendre compte, l’avocat ne peut pas tergiverser, temporiser, encore moins lui envoyer une mise en demeure. Il doit s’exécuter avec empressement, célérité et même zèle », peut-on lire dans la décision.

Après de nombreuses démarches, le plaignant finit par obtenir une réponse à ses questions, mais le compte est vide, alors qu’une somme de quelque 50 000$ devait s’y trouver, selon le Conseil.

Détecteur de mensonges

Pour appuyer ses dires à l’effet que le plaignant avait donné son feu vert pour retirer de l’argent du compte afin de payer ses honoraires, Me Harvey a fait témoigner une « graphologue agréée », mais le Conseil de discipline a rejeté son témoignage.

Le Conseil de discipline a préféré l’opinion d’une experte du syndic, qui agit comme spécialiste en écriture depuis 40 ans devant les tribunaux, qui a conclu que le paraphe AS était une signature par imitation.

Me Harvey a donc été trouvé coupable d'avoir contrefait ou d'avoir fait contrefaire les initiales et de s’être approprié la somme totale de 49 000 $, qu’il s’est versé en quatre occasions par le biais de factures.

De nouveau, Me Stéphane Harvey assure que « tout ce dossier est fondé exclusivement sur la parole du plaignant et l’ « expertise » en écriture du syndic. Au début du dossier, le plaignant refusait même de fournir un échantillon de signature ».

L’avocat de 56 ans renforce sa défense en disant s’être « soumis au détecteur de mensonges avec succès. C’était à l’époque où je croyais le syndic transparent et que je souhaitais les convaincre », ajoute-t-il en précisant que « le plaignant a toujours refusé de s’y soumettre au détecteur de mensonges ».

Un véritable téléroman

Depuis le début, Me Stéphane Harvey a multiplié les démarches pour obtenir un « acquittement ».

Il a déposé une demande déclinatoire pour absence de compétence du conseil.

L’avocat estime que contrairement à l’exigence stricte prévue à l’article 138 du Code des professions, deux des trois membres qui siégeaient sur le conseil n’ont pas été choisis par le Secrétaire du conseil de discipline.

Or, il affirme que le conseil de trois personnes, qui a été formé pour le juger était « invalide » rendant la décision de culpabilité « invalide ».

Dans le but d’obtenir gain de cause, il a transporté le dossier en Cour supérieure avec une requête de Bene Esse pour le dossier 06-21-0333, pour arrêt des procédures, ce qui lui permettrait d’être blanc comme neige.

Les reproches de Me Harvey ne s’arrêtent pas là. Il accuse l’ancien Secrétaire du Conseil de discipline, Me Martin Hovington d’avoir « forgé un document et d’avoir utilisé un faux document afin de permettre au Conseil d’obtenir juridiction sur l’intimé », peut-on lire dans l’un des documents consultés par Droit-inc.

C’est qu’après avoir fait une demande pour obtenir le document de « Désignations des membres », cet été, Me Harvey a remarqué certaines anomalies. Il a alors embauché Simon Lavallée, Bachelier en ingénierie des technologies de l’information et membre de l’ordre des technologues professionnels de la firme H2E. Son rapport est catégorique : « Les métadonnées liées au document PDF indiquent sans conteste que le document est créé le 20 juillet 2022 à 9h21 et 44 secondes ».

Voilà que le dit document indique le 23 septembre 2021. Il s’agirait donc d’une date factice.

Les émissions en rattrapage

Déterminé à « démontrer le stratagème frauduleux du Barreau», il a récemment déposé une demande en récusation du président du Conseil de discipline du Barreau du Québec, Me Jean-Guy Légaré, reprochant au président d’être en conflit d’intérêt, notamment parce que des avocats qui sont prévus livrer un témoignage dans le présent dossier sont les mêmes qui défendent Me Légaré dans une autre cause au civil ou qui ont déjà appartenu à un cabinet qui a défendu Me Légaré dans le passé. Une démarche aux lourdes conséquences de Me Harvey qui s’est avérée infructueuse.

Des chapitres, des scénarios et des synopsis pimentent ce récit plus coloré de jour en jour comme l’avocat fautif qui se défend de son lit d’hôpital, celui qui crie au scandale alors que des avocats qui doivent venir témoigner contre lui sont en conflit d’intérêts ou de s’enguirlander lors d’une solide prise de bec avec Me Lavoie, « qui joue le double rôle de syndic ad hoc et de procureure du syndic ». Une chicane de famille à la limite d’une insubordination au point où le président a dû intervenir pour calmer le jeu, ne sont que des passages qui agrémentent cette cause devenue un véritable téléroman avec des intrigues irrésolues et une partie adverse qui refuse toujours d’accorder une entrevue.

Selon nos informations, cette semaine, l’action du nouvel épisode devrait se dérouler en Cour supérieure, une autre fois, d’où la raison de ne rien manquer de ce feuilleton.
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3 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Quérulent
    Cet avocat quérulent doit être arrêté de pratiquer le plus rapidement possible. Quelle honte pour la profession.

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Difficile à juger, mais tout indique qu'il va se faire rincer
    Cet article ne permet pas de juger du fond de cette histoire, en l'absence des documents pertinents, mais ce qui est certain est que cet avocat cumule les gestes spectaculaires, sans maitriser l'art du pamphlet.

    Même s'il n'avait commis aucune infraction avant le dépôt des plaintes initiales, il risque de se faire démolir pour des faits postérieurs à celles-ci (comme le fameux "manque de collaboration avec le syndic"), exactement comme les gens se font condamner pour avoir résisté à une arrestation jugée plus tard illégale, ou pour avoir violé une condition de remise en liberté consécutive à cette arrestation.

  3. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Suis-je le seul...
    ... à être tanné de ce soap opéra?

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